L’HYPERTROPHIE BÉNIGNE de la prostate (HBP) et la dysfonction érectile sont deux pathologies partageant des mécanismes physiopathologiques communs. Parmi les nombreuses hypothèses avancées, la piste de la prédisposition génétique est l’une des plus récentes : des variations alléliques du gène codant pour la NO synthase pourraient être impliquées dans les deux affections, toutes deux caractérisées par des troubles de la relaxation musculaire lisse. L’athérosclérose pelvienne et la dysrégulation autonomique, qui apparaissent avec l’avancée en âge, sont d’autres facteurs mis en cause, « mais, à l’heure actuelle, nous disposons davantage d’hypothèses que de certitudes », tempère le Pr Stéphane Droupy. Ces liens physiopathologiques se retrouvent au niveau épidémiologique. Globalement, 70 % des hommes présentant des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) liés à une HBP ont peu ou prou des troubles de l’érection, qui ne sont pas toujours identifiés car non rapportés par le patient et non recherchés par le médecin. Selon les données d’un registre portant sur plus de 5 000 hommes, l’âge moyen des patients se plaignant de SBAU est de 64 ans et 83 % d’entre eux sont sexuellement actifs.
Du fait de leur mode d’action, les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (IPDE5) ont logiquement été évalués dans l’HBP symptomatique, mais seul le tadalafil, dont la durée d’action prolongée permet une seule prise quotidienne, a finalement été développé dans cette indication.
Les premières études ont montré une efficacité comparable à celle des alphabloquants sur le score IPSS (International Prostate Score Symptom), mais pas d’effet sur la débitmétrie.
L’étude de phase III randomisée internationale apportée au dossier d’enregistrement pour l’autorisation de mise sur le marché a, en revanche, montré l’efficacité du tadalafil sur la débitmétrie. Cette étude (1) a inclus plus de 600 hommes âgés de plus 45 ans, sexuellement actifs, qui présentaient des SBAU liés à une HBP depuis au moins six mois et des troubles de l’érection depuis au moins trois mois. Ils ont été tirés au sort pour recevoir pendant douze semaines soit du tadalafil 2,5 mg, soit du tadalafil 5 mg, soit un placebo.
Amélioration des scores IPSS et IIEF-EF.
Le score de dysfonction érectile (IIEF-EF, index international de la fonction érectile) a été amélioré avec les deux dosages de tadalafil, mais seule la posologie la plus élevée (5 mg en une prise par jour) a permis d’améliorer de façon significative les SBAU, évalués par le score IPSS. La tolérance du traitement a été bonne, notamment sur les signes vitaux orthostatiques. Aucun cas de rétention d’urines ou de troubles de l’éjaculation n’a été rapporté.
« Si, comme aux États-Unis, le tadalafil obtient une AMM dans le traitement des symptômes liés à l’HBP, cela devrait modifier notre arbre décisionnel. Tout d’abord, il nous faudra systématiquement rechercher des troubles de l’érection face à un patient se plaignant de SBAU. Et ensuite il faudra l’informer de la possibilité de prendre un traitement permettant de traiter les symptômes de l’HBP, mais aussi la dysfonction érectile, bien toléré, ayant peu de contre-indications, mais d’un certain coût, puisque ce médicament ne devrait pas être remboursé, expose le Pr Stéphane Droupy. À terme, le tadalafil pourrait également avoir un intérêt en association à un alphabloquant, voire à un inhibiteur de la 5 alpharéductase en deuxième intention ».
D’après un entretien avec le Pr Stéphane Droupy, CHU, Nîmes.
(1) Roehrbrn C., et coll. Impact du Tadalafil (T) 5 mg prise quotidienne sur la dysfonction érectile (DE) et les signes et symptômes de l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP-TUBA) chez les hommes souffrant de DE et d’HBP : résultats d’une étude internationale randomisée, double-aveugle contre placebo. Communication orale lors du congrès de l’Association française d’urologie, novembre 2011 (O-122).
Liens d’intérêts : Le Pr Stéphane Droupy est consultant, orateur lors de symposiums et investigateurs d’études cliniques pour le laboratoire Lilly.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024