Facteurs de risque cardiovasculaire
Cette fréquence élevée des maladies CV semble liée à :
- une prévalence élevée des facteurs de risque classiques : âge, HTA, hyperlipidémie, diabète, sédentarité ;
- des facteurs de risque spécifiques : surcharge hydrosodée ou variations de la volémie, anémie, troubles du métabolisme phosphocalcique, hyperkaliémie.
Les dyslipidémies apparaissent précocement dans l’histoire de l’IRC et persistent après mise en route de la dialyse : 40 à 50 % des dialysés ont une dyslipidémie : un cholestérol total subnormal, une augmentation du LDL-cholestérol, une baisse du HDL et une augmentation des triglycérides (surtout postprandiale). Ces anomalies doivent être traitées par les statines voire par une association ézétimibe-simvastatine qui serait plus efficace d’après l’étude très récente SHARP.
L’anémie favorise l’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) et l’ischémie myocardique ; elle est actuellement bien corrigée par l’administration d’érythropoïétine.
Les troubles du métabolisme phosphocalcique : l’hypocalcémie et l’hyperparathyroïdie augmenteraient le risque d’HVG, d’ischémie myocardique et d’insuffisance cardiaque, ainsi que celui de calcifications valvulaires.
La pathologie coronaire chez les dialysés
Elle est la première cause de décès d’origine CV : 20 % des patients débutant leur dialyse ont déjà un antécédent d’infarctus du myocarde (IDM).
Les lésions athéromateuses sont évidemment un facteur majeur d’atteinte coronaire mais, dans 25 % des ischémies, il n’y a pas de sténose athéromateuse des artères coronaires. L’ischémie myocardique est alors la conséquence de plusieurs facteurs : l’HVG secondaire à l’IRC (qui augmente les besoins en oxygène du myocarde), l’anémie (qui diminue les apports en oxygène), l’augmentation du débit cardiaque induite par la surcharge hydrosodée chronique, une fistule artérioveineuse à fort débit, l’augmentation de l’activité sympathique.
Sur le plan clinique, dans 20 à 40 % des cas, l’ischémie myocardique est silencieuse, l’ECG d’effort est peu performant en raison des difficultés à atteindre un effort maximal ; le diagnostic repose donc sur la scintigraphie myocardique ou l’échocardiographie à la dobutamine.
Les dialysés meurent d’IDM pour 40 % d’entre eux et 14 % des décès cardiaques sont attribués à un IDM aigu dans la base de données du registre américain des IRC terminales. La survie après IDM est très compromise, avec une mortalité de 60 % à 1 an, même chez les patients reperfusés. Parmi les causes cardiaques des décès par IDM des dialysés, l’essentiel vient des arythmies avec arrêt circulatoire : 26 % de la mortalité totale (USRDS 2006 – 2008).
Les raisons de cette mortalité élevée des dialysés sont multiples : diagnostic d’IDM moins souvent évoqué, moins de douleur thoracique (44 % contre 68 % chez les normorénaux), plus d’insuffisance cardiaque, moins d’IDM ST + (22 % contre 41 %), plus de mortalité hospitalière et d’arrêt circulatoire imprévu pendant l’hospitalisation (11 % contre 5 %), plus de bloc de branche gauche rendant l’interprétation de l’ECG difficile (15 % contre 3 %).
L’hypertrophie ventriculaire gauche
L’HVG est présente chez 60 à 80 % des dialysés. Elle expose à la dysfonction ventriculaire gauche, à l’ischémie myocardique, aux épisodes d’hypotension artérielle pendant la dialyse et aux arythmies cardiaques.
Elle entraîne une insuffisance cardiaque par dysfonction diastolique surtout patente avant la dialyse en raison de l’augmentation progressive de la volémie entre deux séances.
Les péricardites
Elles s’observent chez les patients sous-dialysés et sont donc devenues rares ; elles imposent de rechercher une autre cause, tuberculeuse ou virale.
Les valvulopathies
Les calcifications sont fréquentes sur les valves aortiques (30 à 50 % des patients) ou mitrales (10 à 40 %), surtout chez les patients dialysés depuis longtemps. Les rétrécissements aortiques serrés et les insuffisances mitrales touchent 10 % des dialysés.
Les endocardites
Elles sont plus fréquentes chez les dialysés en raison des lésions valvulaires et des piqûres vasculaires ; le germe le plus souvent en cause est le Staphylococcus epidermidis.
Les arythmies cardiaques
La prévalence de la fibrillation atriale (FA) chez les IRC est d’environ 20 %. Le risque de mort subite cardiaque est augmenté à 24,1 par 1 000 patients/années chez les dialysés. On sait que la cause majeure de décès chez le dialysé est cardiaque (45 %) dont 60 % sont des morts subites.
Après dialyse, après un pic dans les douze premières heures, le taux de mort subite cardiaque monte progressivement pour atteindre un pic dans la tranche 60e – 72e heure et ne paraît pas lié à la kaliémie.
La prévention relève d’une prescription plus grande des bêtabloquants. Or, ils sont insuffisamment employés : 24 % seulement des dialysés coronariens et/ou ayant eu un IDM sont sous ce type de traitement. Quant aux défibrillateurs automatiques implantables (DAI), leur fréquence d’implantation approche les 0,8 % chez les dialysés. En prévention secondaire, le DAI réduit de 42 % la mortalité (< 0,0001). Les complications liées au DAIS sont plus fréquentes, en particulier la mortalité lors de l’implantation.
Hypertension artérielle
Chez les dialysés, la prévalence de l’HTA est très variable jusqu’à 60 %. Elle est surtout liée à une augmentation de la volémie par rétention hydrosodée très fréquente (85-90 %) chez les dialysés, à une activation des systèmes sympathiques et rénine angiotensine.
Au total, les complications CV sont la principale cause de mortalité (50 % à cinq ans) chez les IRC et les dialysés ayant une maladie coronaire avérée. Les mécanismes sont multiples : HTA, HVG, dysfonction diastolique ventriculaire gauche, ischémie, atteinte valvulaire.
Références
- Insuffisance rénale chronique par Rossert J et Poli I in Cœur et Médecine Interne par A Cohen et N Belmatoug. Ed ESTEM ; 2002, 89 : 2043-62.
- Insuffisance rénale chronique et maladies CV. American Heart Association, 14 novembre 2010, Chicago, par Herzog C (Directeur de l’US Renal Data System [USRDS], Minneapolis) et Sarnak M J (Boston).
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