À quelles conditions, et comment doit-on être autorisé à maintenir en culture in vitro un embryon préimplantatoire humain ? Comment encadrer la possibilité de produire des mini-organes fonctionnels à partir de cellules-souches pluripotentes embryonnaires ? Peut-on reproduire les premières étapes de la vie embryonnaire en vue de recherches ? La recherche sur l'embryon et les cellules-souches suscite des tensions éthiques entre le respect dû à l’embryon comme personne potentielle et l’importance de recherches dont les résultats pourraient être traduits au bénéfice des patients.
En France, seuls les embryons surnuméraires issus de l'aide médicale à la procréation peuvent être utilisés à des fins de recherche. À travers l'article 1er de la loi de bioéthique de 2011, la France a ratifié la convention internationale d’Oviedo pour la protection des droits de l’Homme et de la dignité de l’être humains, qui interdit la constitution d’embryons à des fins de recherche. D'autres pays comme les Pays-Bas, le Royaume-Uni ou Singapour ont pour leur part sauté le pas.
Fécondé pour être étudié
Pour le Pr Samir Hamamah, chef du département de biologie de la reproduction au CHU de Montpellier et directeur de l'unité INSERM 1 203 « Développement embryonique précoce et pluripotente », la recherche sur l'embryon ne peut pas reposer uniquement sur les embryons conçus dans le cadre d'une FIV. « Ce ne sont pas des bons modèles, puisqu'il s'agit d'embryons obtenus aléatoirement et provenant de couples ayant des problèmes de fertilité, et peut-être des mutations, explique-t-il, nous devons pouvoir modifier des gamètes et procéder à leur croisement pour voir l'effet des manipulations de tel ou tel gène sur le développement. C'est en contrôlant les embryons utilisés dans la recherche que nous pourrons savoir, par exemple, quel est l'effet du milieu de culture sur la viabilité d'un embryon, et ainsi améliorer notre taux de réussite de la PMA qui est un des plus mauvais au monde ! »
Lever les blocages
Dans l'immédiat, le Pr Hamamah plaide pour une simplification des procédures : « Il y a des milliers d'embryons congelés qui peuvent être utilisés, mais la recherche n'est pas assez attractive, faute d'avoir des réponses à nos demandes en moins de 12 à 18 mois », résume-t-il.
Un autre facteur limitant la pratique des chercheurs est la limite de temps après quoi il n'est plus possible d'utiliser un embryon pour la recherche. Il n'existe pas de limite légale de temps en France. Toutefois le Comité consultatif national d'éthique préconise dans son Avis N° 67 de janvier 2001, sur l’avant-projet de révision des lois de bioéthique d'interdire la poursuite du développement d’un embryon in vitro au-delà de la fin du stade pré-implantatoire, soit 7 jours après la fécondation. Une limite jugée « raisonnable » par le Pr Hamamah, qui précise « qu'au-delà de 7 jours, le développement ne se fait pas bien en dehors d'une matrice utérine. Étudier des tels embryons in vitro n'est pas pertinent. »
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