LES JEUX sont pratiquement faits : la victoire de la gauche au second tour ne fait plus de doute et la seule question concerne l’ampleur de cette victoire. Les échauffourées qu’il provoque dans le paysage politique au sujet des comprimossions, supposées ou réelles, de l’UMP, ont pour objectif d’écraser celle-ci. On peut estimer que ce harcèlement est de bonne guerre. Les tentatives de la droite classique pour obtenir une forte minorité n’en sont pas moins légitimes. La gauche arrive au pouvoir en se réclamant d’une immaculée vertu. Elle n’en est pas moins la première bénéficiaire de l’ascension, apparemment irrésistible, du parti de Marine Le Pen. Plus que l’antisarkozysme, c’est le transfert de quelque millions de voix de l’UMP au Front qui aura fait la différence. Par ailleurs, le PS a ses propres faiblesses : on n’est pas doté d’une éblouissante vertu quand on décide que Ségolène Royal sera députée, puis présidente de l’Assemblée nationale, avant qu’elle se présente aux électeurs et même si l’ancienne candidate à la présidence de la République a toute la légitimité requise pour briguer un mandat dans sa région.
L’appel aux électeurs du Front.
Les leaders de l’UMP se sont au moins gardés d’imiter les candidats de leur camp en ballottage défavorable, comme Nadine Morano, qui n’hésitent plus à lancer un appel aux électeurs du FN, soit en accordant quelque mérite à leurs convictions, soit en leur disant qu’avec l’UMP, au moins, certaines de leurs revendications seront satisfaites. On assiste à l’aboutissement quelque peu tragique de la stratégie de Nicolas Sarkozy, qui a cherché inlassablement, mais en vain, à conquérir l’électorat frontiste. Il ne s’agit plus de « valeurs » (le mot le plus galvaudé finit par devenir suspect), mais de survie politique. Marine Le Pen n’est pas un agréable succédané de son père ; elle cherche à supplanter l’UMP et à faire du Front le premier parti de la droite ; son succès éventuel passe par la destruction de la droite classique.
LA MONTEE DU FN RELEVE MOINS DE L’ANTISARKOZYSME QUE DE LA CRISE
Elle a renforcé le FN, devenu impossible à ignorer ou à oublier. Il est bel et bien présent dans toutes élections, à tel point qu’il est en mesure, à la veille du second tour, d’obtenir deux ou trois sièges à l’Assemblée, en dépit de l’implacable machine à broyer les extrêmes qu’est le scrutin uninominal majoritaire à deux tours.
La montée du Front est moins le produit de la stratégie sarkozyste que d’une crise économique, sociale et financière profonde qui conduit une partie des Français à faire table rase de leurs anciens dirigeants et d’en trouver de nouveaux. Ce n’est pas un phénomène circonscrit à la France, il a gagné beaucoup de pays du Vieux-Continent dont la gestion est compliquée par la haine de l’Union européenne et de l’euro. Marine Le Pen surfe sur l’angoisse et le sentiment d’insécurité. Quand la gauche aura la majorité, la patronne du Front sera toujours là. Elle disparaîtra d’autant moins que François Hollande entend réintroduire une dose de proportionnelle dans les grands scrutins nationaux, ce qui ouvrira les portes du Parlement à de nombreux élus FN. Pour tous les républicains convaincus, cette perspective est inquiétante. Elle exige autre chose que d’afficher sa vertu en sautoir et que de mièvres propos sur les inaltérables principes éthiques qui gouverneraient la conduite de la gauche. Et tandis que droite et gauche se disputent sur celui qui lave plus blanc, se muliplient les phénomènes sociaux d’intolérance, de xénophobie, de course aux solutions miracle, mais inapplicables.
Il est infiniment préférable, au total, que les électeurs frontistes fassent la navette entre le parti qu’ils vénèrent et celui qu’ils considèrent comme un pis-aller, qu’ils retournent au bercail au second tour, qu’ils s’intègrent, fût-ce superficiellement, à un parti de gouvernement qui tient compte de leurs objections et de leurs craintes, mais ne risque pas d’entraîner la France dans une aventure d’où elle ne reviendrait pas. Un choix national qui se limiterait à deux propositions, celle de la gauche et celle du Front, serait désastreux.
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