Après des semaines de tergiversations les autorités russes commencent à prendre conscience de la gravité de la situation, avec 52 763 cas avérés et 456 décès enregistrés en début de semaine. Et elle tente de combler les failles béantes du système de santé.
Le coronavirus est arrivé en Russie presque « incognito ». La population, au courant par les médias, en parlait en plaisantant, persuadée que leur immunité naturelle, Dieu et la vodka, constituaient la meilleure protection contre le virus. Quant au monde politique, il était davantage préoccupé par la réforme constitutionnelle permettant à Vladimir Poutine de se représenter en 2024 que des menaces sur la santé des Russes. Et pour ne rien arranger, le pays dispose d'un système de santé peu efficace, même en temps normal.
Gestion chaotique et confinement à géométrie variable.
Force est de constater que dans ce contexte la gestion de la crise sanitaire ne pouvait être que chaotique. Le 25 mars, alors qu’on s’attendait à la proclamation de l’état d’urgence, Vladimir Poutine appelle les Russes à rester chez eux une semaine, sans toutefois prononcer les mots « quarantaine » ou « confinement ». Le 2 avril, il fait savoir qu’il délègue aux gouverneurs de provinces la gestion de la crise sanitaire, décision qui génère un véritable chaos dans la gestion de la pandémie, sans pour autant en freiner la propagation.
À Moscou, épicentre de la pandémie, le maire, Serge Sobianine, module ses décisions avec la courbe des nouveaux malades : confinement des personnes de plus de 65 ans, puis de tous les habitants de la mégapole (12 millions), laisser-passer électronique pour les automobilistes et les usagers de transports en commun.
Dans d’autres régions, par exemple dans celle d’Orienbourg, le gouverneur a pris des mesures a minima : rassemblements certes interdits, centres commerciaux, cafés, restaurants, salles de sport fermés, mais les entreprises et les petits commerces sont ouverts, les habitants peuvent circuler et travailler librement. A l’inverse La Tchétchénie est fermée : on ne peut y rentrer ou en sortir sans une autorisation spéciale.
Mobilisation tous azimuts pour doper le système de santé
Malgré la conversion d’hôpitaux et de cliniques privées en hôpitaux pour accueillir les malades du Covid-19 et la mise en service d’un nouvel établissement hospitalier pour les maladies infectieuses dans la région de Moscou, le nombre de lits en hospitalisation et en réanimation est très insuffisant. Selon Tatiana Golikova, la vice premier ministre en charge de la Santé, qui espère pouvoir en doubler le nombre d’ici deux mois, il y aurait à l’heure actuelle 45 000 lits de réanimation. La Russie manque de respirateurs en particulier en régions (5 000), le ministre de l’industrie et du commerce, Denis Mansourov, a raconté, lors d’une interview à la chaîne TV Russie 24, que le déficit serait comblé grâce à l’effort d’entreprises qui s’étaient engagées à en produire 200 puis 300 par semaine contre 4 à 5 dans la période précédente. Le ministre a également évoqué la question des équipements de protections : masques chirurgicaux, combinaisons pour les médecins en contact avec les personnes infectées. Cinq millions de masques par jour devaient être mis à la disposition du personnel hospitalier ainsi que des combinaisons de protection fabriquées en Russie ou importées.
Enfin, une aide spéciale sera accordée aux médecins et aux infirmières. Il était grand temps : ces derniers, en première ligne dans la guerre contre le virus, commençaient à se révolter contre leurs conditions de travail. La semaine dernière, un collectif de médecins de l’hôpital Petrovskaïa de Saint Pétersbourg où 100 membres du personnel soignant ont été infectés par le virus a lancé un appel alarmant : « nous ne refusons pas de travailler mais nous ne pouvons pas continuer à soigner des patients infectés sans protection».
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