MUNICIPALES 2014 - Malgré les garde-fous de la loi Bachelot

L’hôpital reste la chasse gardée des maires

Publié le 17/02/2014
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Crédit photo : AFP

Les émois du printemps 2009 semblent loin derrière. Les élus locaux étaient pourtant montés au créneau pour défendre leur place à l’hôpital. En vain. Le Parlement a renforcé le rôle du directeur, et privé le maire de la présidence automatique du conseil d’administration, transformé en conseil de surveillance. Une petite révolution.

Jean-Pierre Door, député UMP, a voté la loi HPST (Hôpital, patients, santé, territoires). Comment vit-il la réforme, avec sa casquette de maire de Montargis (Loiret) ? « Cela se passe très bien sur mon territoire, assure-t-il. On a réalisé une communauté hospitalière de territoire (CHT), un groupement de coopération sanitaire. La gouvernance de l’hôpital est fonctionnelle ». Une élue dont il est proche a été élue présidente du conseil de surveillance.

Le député-maire n’y siège pas mais il garde un œil direct sur l’hôpital. « Tous les deux mois, je vois le directeur et le président de la CME. Il m’arrive même de recevoir les syndicats. Je porte les demandes auprès de l’ARS quand il faut investir, quand les urgences débordent ». S’il fallait revoter la loi, Jean-Pierre Door n’hésiterait pas. « Le maire reçoit chaque jour des demandes d’emploi : il fallait mettre fin au clientélisme. Là où le maire ne préside plus le conseil de surveillance, il n’y a plus d’emploi privilégié ».

Le maire UMP de la Mure (Isère) avait participé à la mission Larcher. Lui aussi juge la situation assainie. « Je ne réclame pas le pouvoir à l’hôpital car la mairie n’y verse pas un euro. Le budget est réellement fait par ceux qui l’exécutent. On est sorti de l’hypocrisie ». Fabrice Marchiol a beaucoup réfléchi au contenu de la loi Bachelot. Ce qui ne l’a pas empêché, sur certains chapitres, de s’en démarquer. Et donc de continuer à exercer son pouvoir de maire : « L’hôpital de La Mure est le seul du territoire à ne pas avoir rejoint la CHT articulée autour du CHU de Grenoble. J’ai voté contre. Mon hôpital a déjà une direction commune avec le CHU. Cumuler cela avec une CHT, cela aurait été faire une fusion déguisée ».

Dans les petites villes, la bonne entente prévaut

Comment réagit-on dans les municipalités de gauche ? Les deux villes contactées, elles aussi, ont maintenu des liens privilégiés avec l’hôpital. À Saint-Affrique (Aveyron), « le directeur s’est assis sur le texte », affirme Alain Fauconnier (PS). « L’hôpital est un tel enjeu dans les petites villes que le directeur est obligé de rester en lien étroit avec le maire. Sinon, il y aurait rapidement le feu sur le territoire ». Le maire conserve un rôle clé, notamment lorsqu’il s’agit d’accompagner les mesures douloureuses. « J’ai soutenu le contrat de retour à l’équilibre même si les syndicats n’étaient pas contents, poursuit Alain Fauconnier. C’est l’avenir de l’hôpital qui est en jeu. Imaginer la signature d’un tel contrat sans le soutien des élus est irréaliste ».

Michel Vergnier, député-maire PS de Guéret (Creuse), préside lui aussi le conseil de surveillance de l’hôpital, et entretient de bonnes relations avec la direction. « Mais il y a des endroits où cela se passe très mal et où le divorce est consommé. J’ai dit à Marisol Touraine qu’il fallait réécrire HPST et nous redonner le pouvoir d’avant. En tant que maire, je représente les usagers, or je suis complètement débranché des décisions sur les effectifs ».

Le plus critique est Christian Troadec, maire de Carhaix (Finistère). Le leader du mouvement des bonnets rouges a bataillé pour le maintien de la maternité et de la chirurgie. Depuis la fusion avec le CHU, tout se joue à Brest. « Le CHU est en déficit, le directeur général peut couper ce qu’il veut à Carhaix. Mon pouvoir ? Je n’en ai plus aucun ».

Delphine Chardon

Source : Le Quotidien du Médecin: 9302