Un effort sans précédent sera demandé l’an prochain aux acteurs du système de santé dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Sur le papier, industriels, médecins de ville et hôpital devront réaliser 3,2 milliards d’euros d’économies en 2015 (en 2014 la facture n’était « que » de 2,4 milliards d’euros).
Dans ce contexte contraint, d’abord faute de recettes, les patients ne seront pas directement mis à contribution. La ministre de la Santé a exclu tout « nouveau déremboursement, franchise ou forfait ». Mais l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM) ne devra pas dépasser 2,1 % en 2015, un taux historiquement bas, alors que les dépenses progressent mécaniquement deux fois plus vite.
Le gouvernement espère contenir le déficit de la branche maladie sous la barre des 7 milliards d’euros.
Le médicament principal contributeur
Une fois n’est pas coutume, l’industrie du médicament paie le plus lourd tribut (tableau). Baisses de prix massives, promotion des génériques et bon usage des médicaments en ville et à l’hôpital doivent permettre d’épargner environ 1,6 milliard d’euros, soit la moitié des économies attendues. Le gouvernement a également décidé de réformer le mécanisme de régulation (a posteriori) des dépenses remboursées de médicaments (ex taux K) dans le sens d’une maîtrise plus efficace.
Le gouvernement a surtout pris une mesure inédite de régulation des dépenses du traitement de l’hépatite C – le Sovaldi du laboratoire Gilead, par exemple, représente un coût de 56 000 euros par patient pour 3 mois de traitement (lire aussi page 8). « Si le chiffre d’affaires total dévolu au traitement de l’hépatite C était supérieur à un montant défini par la loi (450 millions en 2014 et à 700 millions d’euros en 2015), le mécanisme pourrait faire supporter le dépassement aux seuls laboratoires concernés », argumente Marisol Touraine pour justifier ce contrôle ciblé d’une classe thérapeutique particulière (anti-VHC).
Des contrats « pertinence » dans les établissements
Avec un ONDAM hospitalier limité à 2 % l’an prochain, les économies n’épargnent pas l’hôpital, même si la plupart des mesures sont de facture classique. L’optimisation des achats, de la logistique, et des dépenses des établissements et une « gestion plus pertinente » de la liste en sus doivent procurer plus de 500 millions d’euros d’économies.
Après avoir mis fin à la convergence tarifaire et amorcé la dégressivité des tarifs, le gouvernement poursuit la réforme du financement des établissements avec une mesure plus directive. Les agences régionales de santé pourront conclure des contrats avec les hôpitaux les moins pertinents et leur allouer des objectifs qualitatifs et quantitatifs d’amélioration (sur des indicateurs tels que le taux de recours aux soins hospitaliers, les pratiques opératoires, les prescriptions, actes ou séjours...). Les établissements qui n’auront pas tenu leurs objectifs pourront être soumis à une mise sous observation pendant 6 mois. Sans résultat, certaines de leurs prescriptions pourront être placées sous autorisation préalable de l’assurance-maladie et des pénalités financières leur être appliquées.
Un virage ambulatoire sans moyens ?
L’ONDAM des soins de ville (+2,2 %) n’autorisera guère de largesse financière pour la médecine libérale. Le gouvernement n’a toujours pas précisé le montant de l’enveloppe budgétaire dont disposera l’assurance-maladie pour rémunérer les équipes de soins de proximité.
Et les signaux préoccupants s’accumulent. Non seulement la ministre de la Santé a écarté toute hausse de la consultation (voir ci-dessous) mais elle a confirmé la mise en place au 1er juillet 2015 du tiers payant intégral pour les bénéficiaires de l’ACS, avant la généralisation à tous les patients en 2017.
Enfin, certaines spécialités seront une nouvelle fois soumises à des décotes de tarifs. Un leader syndical n’exclut pas que ce coup de rabot touche d’autres spécialités que les biologistes et les radiologues très régulièrement visés.
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