L'étude qui change l'image de la fièvre

Le comportement malade de l'enfant fébrile est indépendant de l'intensité d'une hyperthermie

Par
Publié le 03/04/2017
Article réservé aux abonnés
fievre

fievre
Crédit photo : PHANIE

La fièvre ne serait pas responsable du comportement malade chez un enfant fébrile. C'est ce que démontre pour la première fois une étude publiée dans « PLoS One » chez 200 enfants fébriles (âgés de 6 mois à 3 ans) par l'association ACTIV (Association Clinique et Thérapeutique Infantile du Val-de-Marne), une association de recherche clinique de pédiatres libéraux.

« La fièvre et le comportement malade ont longtemps été compris comme deux phénomènes réunis, explique le Dr François Corrard, pédiatre à Combs-la-Ville et premier auteur. Tous les bons manuels parlaient de "tolérance de la fièvre". Il semble en être autrement et s'agir de deux voies distinctes liées à la réponse immunitaire face à une infection ».

L'image de la fièvre est en train doucement de changer. « Il y a encore quelques années, il fallait faire baisser la fièvre coûte que coûte, se souvient le Dr Corrard. Quitte à employer des mesures parfois mal tolérées par l'enfant, comme les bains frais et les vessies de glace. Aujourd'hui, la fièvre devient respectable. C'est le signe d'un enfant qui est en train de se défendre. Le fait de générer de la chaleur est un mécanisme acquis au cours de l'évolution, les animaux exothermes malades vont se réfugier près des sources de chaleur pour aider la guérison. L'enfant bénéficie d'une régulation de température sans contrainte de l'extérieur ».

Fiche mémo de la HAS

Dans ses dernières recommandations sur la prise en charge de la fièvre chez l'enfant en octobre 2016, auxquelles a participé le Dr Corrard, la Haute Autorité de Santé (HAS) indique clairement que « la fièvre n'est généralement pas dangereuse » et que « l'objectif du traitement est la suppression de l'inconfort et non la normalisation de la température ». Même pour les convulsions fébriles, « qui ne sont pas déclenchées par la fièvre seule », rappelle le pédiatre, il est prouvé que « la crise ne peut pas être prévenue par les antipyrétiques ».

Comme la fièvre, le comportement malade n'est pas constant. Dans l'étude, les pédiatres chercheurs ont choisi d'évaluer 6 paramètres : temps passé à jouer, distance parcourue, temps passé à la recherche de câlins et de réconfort, temps d'énervement ou de mise en colère, temps passé à chouiner, pleurnicher ou pleurer, l'expression du visage.

Huit paramètres indépendants

« Les enfants inclus présentaient une fièvre ≥ 39 °C depuis au moins 12 heures et ≥ 38 °C à l'inclusion, précise François Corrard. Il était demandé au parent qui avait emmené l'enfant et s'était occupé de lui dans les deux heures précédant la consultation de coter l'intensité de chaque signe par rapport à l'état habituel de l'enfant ». Deux paramètres supplémentaires étaient évalués sur les dernières 24 heures : le temps passé à dormir et l'appétit.

L'étude met en lumière l'indépendance de chacun des 8 paramètres par rapport au niveau de fièvre à l'inclusion (99 enfants à 38-38,5 °C, 48 enfants à 38,6-39 °C, 56 enfants à 39,1-40,5 °C). Le choix de ces signes était validé comme le montrait la différence significative constatée avec les valeurs médianes observées chez 200 enfants non fébriles du même âge.

« La fièvre et le comportement malade sont donc deux manifestations cliniques de la réponse immunitaire, conclut le Dr Corrard. L'inconfort devient la seule justification du traitement qui n'a plus d'objectif antipyrétique ».

Les scores moyens des 8 paramètres sont indépendants de l'intensité de la fièvre à l'inclusion. (Source : PLoS ONE) 


Source : Le Quotidien du médecin: 9569