La prise en charge thérapeutique de la néphropathie à IgA (NIgA) s’appuie actuellement sur les recommandations internationales KDIGO datant de 2012. Si le traitement néphroprotecteur est formellement recommandé (niveau 1B), la corticothérapie n’est proposée qu’à un niveau de suggestion (2C) pour un sous-groupe de patients présentant une protéinurie persistante > 1 g/jour après 3 – 6 mois de traitement néphroprotecteur et une fonction rénale conservée (> 50 ml/min) [1]. Les études à l’origine de ces recommandations sont cependant limitées par leur caractère rétrospectif ou par l’absence de traitement néphroprotecteur optimal.
Deux études prospectives ont récemment évalué la place de la corticothérapie dans cette néphropathie.
L’essai STOP IgAN (2) a comparé l’efficacité d’un traitement néphroprotecteur optimal seul à l’adjonction d’un traitement immunosuppresseur (corticothérapie seule type Pozzi ou association corticothérapie + cyclophosphamide per os type Ballardie), après une phase commune de traitement néphroprotecteur optimal de 6 mois, et dans une population de patients atteints d’une NIgA à risque de progression (protéinurie persistante > 0,75 g/24 heures).
L’essai TESTING (non publié actuellement) a comparé en double aveugle l’utilisation d’un traitement néphroprotecteur seul à l’adjonction d’une corticothérapie par méthylprednisolone dans une population comparable à l’essai STOP-IgAN.
Ces deux études montrent une efficacité de la corticothérapie sur la régression de la protéinurie. Aucun effet significatif sur le DFG n’a cependant été mis en évidence dans le groupe traité au cours l’essai STOP-IgAN, avec, toutefois, un probable manque de puissance et une durée de suivi relativement courte (3 ans) dans cette pathologie d’évolution lente.
Arrêt prématuré pour effets secondaires graves
Les premières communications orales concernant les résultats de l’essai TESTING semblent en faveur d’un bénéfice de la corticothérapie sur l’évolution de la fonction rénale. L’étude a cependant été stoppée prématurément (suivi médian 1,5 an) en raison d’effets secondaires graves, en particulier infectieux, plus fréquents dans le groupe traité. Ces effets secondaires ont également été soulignés dans une autre étude (3), en particulier chez les patients présentant une fonction rénale altérée.
Enfin, les résultats de l’étude NEFIGAN sur l’effet du Budesonide (corticoïde par voie entérique avec effets systémiques réduits) sont attendus avec impatience compte tenu d’une analyse intermédiaire encourageante (effets positifs sur la réduction de la protéinurie à 9 mois dans le groupe traité) et de la réduction du nombre d’effets secondaires attendus.
Aucune de ces études n’a actuellement permis de valider l’utilisation d’un traitement immunosuppresseur autre que la corticothérapie. En effet, l’étude STOP-IgAN ne permet pas de comparer, au sein du groupe traité, l’efficacité de la corticothérapie seule à celle de l’association corticoïdes + cyclophosphamide (populations traitées différentes). La méta-analyse sur données individuelles de l’équipe de Pozzi (4) n’a pas permis de mettre en évidence un bénéfice supplémentaire de l’association azathioprine + corticoïdes sur une corticothérapie seule. Le Rituximab a également été évalué récemment (5) dans la prise en charge de la NIgA, avec des résultats négatifs sur la réduction de la protéinurie et sur le déclin du DFG. En somme, seule l’association corticoïdes + cyclophosphamide reste suggérée (grade 2D) dans un sous-groupe limité de patients présentant cliniquement une forme rapidement progressive de NIgA, et histologiquement une prolifération extracapillaire intéressant plus de 50 % des glomérules (1).
Bien qu’utilisée depuis de nombreuses années dans cette pathologie, l’efficacité de la corticothérapie n’a été évaluée que récemment. Son utilisation reste malgré tout encore débattue notamment en raison du rapport bénéfice risque potentiellement défavorable. Il semble actuellement injustifié et dogmatique de condamner sa prescription (6), mais celle-ci doit faire l’objet d’une prise en charge personnalisée dans une population de patients atteints de NIgA à risque de progression (7).
CHU Saint-Étienne
(1) Glomerulonephritis Work Group Kidney int Suppl 2012;2:139–274
(2) Rauen T et al. N Engl J Med 2015;373:2225–36
(3) Pozzi C et al. Nephrol 2013;26:86–93
(4) Sarcina C et al. Clin J Am Soc Nephrol 2016;11:973-81
(5) Lafayette RA et al. J Am Soc Nephrol JASN 2016 Nov 7; pii: ASN.2016060640.
(6) Jullien P et al. Nephrol Ther 2016;12:493–5
(7) Coppo R et al. JASN 2017;28:25–33
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