Dans un article paru dans « Cell Report » en 2012, une équipe de recherche franco-chinoise avait testé, sur 15 macaques, un vaccin oral d'un nouveau genre, capable de prévenir l'infection par le virus d'immunodéficience simienne (VIS). « Ce vaccin ne produit pas d'anticorps mais recrute et active des lymphocytes T CD8 régulateurs qui n'avaient été observés, jusque-là, que chez la souris », se souvient le Pr Jean-Marie Andrieu, du laboratoire d'oncologie et de virologie moléculaire de l'université Paris Descartes, à Paris, qui avait dirigé les travaux.
Ces lymphocytes T régulateurs « ont la particularité de se fixer sur les CD4 infectés par le SIV, lors de la phase de pénétration dans la cellule et de les bloquer définitivement, inhibant ainsi la réplication du virus », explique le Pr Andrieu. Les auteurs soupçonnaient qu'un tel mécanisme pouvait être également observé chez les patients infectés par le VIH. L'expérience décrite dans « Cell Report » n'avait d'ailleurs pas fonctionné avec une autre espèce de macaque en Inde.
Une découverte chez les super contrôleurs
Pour en avoir le cœur net, les auteurs ont cherché des similitudes chez les patients dits « elite controllers », chez qui le virus ne se multiplie pas, qui représentent 0,3 % des patients infectés par le VIH. Selon leurs derniers travaux publiés le 18 avril dans « Frontiers in Immunology », ces similitudes existent bel et bien, ouvrant la voie à une expérimentation humaine de cette nouvelle piste vaccinale.
Les auteurs ont recruté 10 « super contrôleurs » au sein d'une cohorte de 3 000 patients chinois. Ces derniers étaient porteurs du gène KIR3DL1 et 9 d'entre eux portaient le gène d'histocompatibilité HLA-B : Bw4-80. Les auteurs ont caractérisé une population de lymphocytes T-CD8 + régulateurs exerçant une forte inhibition de la réplication du VIH chez les 9 porteurs de ce variant. Les chercheurs ont montré que c'était la liaison entre la molécule HLA-B : Bw4-801 (présente sur les CD4 + infectés) et KIRD3DL1 (portés par les T-CD8 + régulateur) qui inhibait l'activation des lymphocytes T-CD4 + infectées.
Il n'est cependant pas encore certain que le futur candidat vaccin en cours de préparation sur le modèle du vaccin testé chez le macaque est susceptible de fonctionner chez les patients qui ne sont pas porteurs de ces allèles en particulier. « On n'en saura rien tant que l'on n'aura pas essayé, avoue le Pr Andrieu, le vaccin a fonctionné chez des macaques quelle que soit la version du KIRD3DL1. Le HLA-B : Bw4-801, présent chez 1/3 des humains, est fréquent chez les patients super contrôleurs. Au pire le vaccin sera efficace chez 0,3 % des patients, au mieux chez 100 %, la réponse se trouve entre ces deux extrêmes ».
Le secret des super contrôleurs ?
La découverte de l'interaction entre HLA-B : Bw4-801 et KIR3DL1 est en soi très importante pour le Pr Andrieu. « Cela fait 20 ans que l'on cherche comment les super contrôleurs maîtrisent leur infection sans traitement, il se peut que l'on ait trouvé », espère-t-il.
Les auteurs ont déjà déposé à deux reprises, auprès de l'agence européenne du médicament (EMA), une demande d'autorisation d'expérimentation d'un vaccin comprenant des bactéries commensales Lactobacillus plantarum (qui doivent susciter une immunotolérance afin d'éviter la production d'anticorps) et une version inactivée du VIH (chargé de provoquer l'activation des CD8 + Treg). Le premier dossier a été rejeté et le deuxième est en cours de traitement.
Pour le Pr Andrieu, qui fait figure de franc tireur dans le monde de la recherche sur le VIH - il n'a pas sollicité la cohorte ANRS CO15 des asymptomatiques à long terme pour ses travaux -, la difficulté vient de surtout de l'utilisation d'une version inactivée du VIH.
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