Une telle éventualité est improbable : la gauche, qui a composé quelque 15 % de l'électorat du premier tour, n'avait qu'un objectif, l'élimination de Nicolas Sarkozy, qu'elle a obtenu en un tournemain. Pour qu'elle retourne aux urnes, il faudrait qu'elle perçoive M. Fillon comme très à droite, ce qu'il est sans être assimilable à l'extrême droite. Or, quand on observe que, sur les 28 points de pourcentage qu'il a obtenus, M. Juppé doit en compter au moins une dizaine ou plus en provenance de l'électorat de gauche, on comprend que son noyau dur, à droite et au centre, se situe à moins de 20 %. Il a non seulement souffert des débats où M. Fillon a été meilleur que lui, plus incisif et en même temps d'un calme olympien, mais de son alliance avec François Bayrou, l'homme qui a voté Hollande en 2012 et s'en est même flatté, laissant ivres de rage les militants de la droite sarkozyste, sans lesquels, même si l'ex-président est éliminé, on ne peut être élu candidat de toute la droite. Pour autant qu'ils aient une signification, les sondages expriment, en gros, un rapport 65/35 en faveur de M. Fillon.
Mais la primaire a introduit dans le système électoral des occasions diverses et subtiles de voter. Elle a même acquis une importance considérable dans la mesure où les citoyens ont désormais la possibilité de désigner leur candidat, alors que, auparavant, il leur était imposé. C'est ce qui a engendré l'extraordinaire intérêt du public pour le premier tour. Il est possible, dans ces conditions, que la passion des électeurs ne soit pas retombée, que la gauche veuille renforcer sa certitude que le candidat de la droite pourra écarter Marine Le Pen au second tour de la présidentielle, qu'elle préfère un homme prônant le rassemblement et l'apaisement. Inversement, il devrait y avoir moins de monde lors du second tour de la primaire et, si M. Juppé ne peut compter que sur les Républicains, il sera largement distancé par M. Fillon.
Le monde a changé
En fait, si la primaire densifie la démarche démocratique, elle rend bien imprévisible le comportement des électeurs. M. Juppé s'est efforcé, sans doute à dessein, de ne pas jouer les gros bras pendant la campagne du premier tour, mais le monde a changé et, manifestement, l'attaque frontale de M. Fillon contre Nicolas Sarkozy lui a rapporté plus qu'elle ne lui a coûté. Nous allons donc assister aujourd'hui, après quatre jours d'attaques viruelents contre Fillon, à un débat au cours duquel le maire de Bordeaux va s'efforcer de démontrer que son projet est meilleur que celui de François Fillon, qui va se heurter, c'est sûr, aux blocages de la société française. Il n'est pas exagéré de dire que M. Fillon est l'homme d'une tendance, d'un credo, d'une foi, alors que M. Juppé a les qualités requises pour rassembler les citoyens autour d'un programme sérieux, à la fois réformiste et réalisable.
M. Fillon a déjà entendu cet argument qui n'a froncé aucun de ses sourcils très fournis. Il affirme que, dès lors qu'il affiche son projet et qu'il l'a largement exposé, il aura, le moment venu, toute légitimité pour le mettre en pratique. C'est vrai, du point de vue de la logique, ça l'est moins quand on tient compte de la volatilité de l'électorat, de la résistance des syndicats, d'une opposition qui, de Mélenchon à Montebourg en passant par le PC et les Verts, stigmatiserait à l'envi les mesures adoptées par le gouvernement du président Fillon. Il ne faut pas oublier que son projet très libéral est rendu moins nécessaire par la décision de la Communauté européenne d'en finir avec l'austérité, qu'il aura à cœur de défaire une partie, sinon tout, des lois que la gauche a prises en matière de mœurs, qu'il est inspiré par le catholicisme, qu'il a voté contre le traité de Maastricht, qu'il est soutenu par Sens commun, mouvement éminemment réactionnaire, mais que, depuis, il est devenu raisonnablement européen. Sont-ce des arguments suffisants pour le stopper dans sa course ? On n'en donnerait pas sa main à couper.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation