Après les conférences de presse des multinationales américaines Pfizer et Moderna, tous les regards sont tournés vers le candidat vaccin ChAdOx1 conçu et développé par le consortium formé par l’institut Jenner d’Oxford, le laboratoire italien de recherches moléculaires Advent-IRBM et la multinationale anglo-suédoise AstraZeneca. Les essais cliniques de phase 3 devraient être terminés d’ici à quelques jours et la demande d’autorisation à la commercialisation présentée dans la foulée. Le point avec Piero Di Lorenzo, président d'Advent-IRBM.
LE QUOTIDIEN : L’évaluation du vaccin anti-Covid « ChAdOx1 » par l’Agence européenne du médicament (EMA) et la FDA est-elle toujours prévue avant la mi-décembre ?
PIERO DI LORENZO : Nous allons terminer la troisième phase des essais cliniques dans les prochains jours. Les résultats qui arrivent des laboratoires sont extrêmement positifs. Ceci dit, il faut maintenant aligner toutes les données scientifiques pour finir de monter le dossier qui va être déposé auprès de l'EMA et de son homologue américain, la FDA. C’est désormais une question d’heures, au plus de quelques jours. Nous ne pouvons pas en l’état actuel donner de date précise sur l’autorisation à la commercialisation de notre candidat vaccin qui sera accordée par l’EMA et la FDA, ces dernières marchant main dans la main. Mais je crois que nous l’obtiendrons à la mi-décembre, peut-être même avant.
La concurrence des candidats vaccins est-elle en train d’embouteiller l’évaluation et freine-t-elle le processus d’approbation ?
En aucun cas ! Les agences de régulation ont été ponctuellement informées des résultats des essais durant les phases précédentes pour leur permettre de suivre l’évolution des tests. En ce qui concerne la validité de tous les candidats vaccins et je pense aussi aux prophylaxies russes et chinoises, je ne remets rien en cause. Les scientifiques russes sont très forts. Par ailleurs, nous savons qu’ils ont utilisé la même plateforme vaccinale que nous, à base de vecteurs adénoviraux.
D’ici deux à trois mois, sept ou huit vaccins seront prêts et au moins une dizaine d’ici au printemps prochain. Je pense en particulier aux projets de prophylaxies développés par Johnson & Johnson mais aussi Sanofi. C’est un bien car lorsque nous aurons dépassé le moment de l’euphorie avec les premières vaccinations, les consommateurs devront avoir la possibilité de choisir un vaccin comme c’est actuellement le cas avec la prophylaxie antigrippale. Le marché est vaste et nous aurons chacun notre moment de gloire !
Pourtant, en l’état actuel, la course est particulièrement serrée…
C’est vrai et tous les scénarios sont encore possibles. Il y a eu plusieurs conférences de presse mais les données scientifiques finales n’ont pas encore été publiées. L’important aujourd’hui est d’avoir un vaccin ou des vaccins pour enrayer la pandémie. Ce qui me désole en revanche, c’est d’entendre qu’une partie importante de la population est très sceptique et qu’elle s’interroge sur la validité des prophylaxies contre le Covid-19. Cette attitude est liée à un problème de communication et d’éducation sanitaire.
Que pensez-vous des résultats affichés par les laboratoires concurrents ? Comment se positionne le ChAdOX 1 par rapport aux autres candidats ?
Je préfère m’abstenir. Toutefois, il aurait fallu attendre d’avoir tous les résultats avant d’organiser une conférence de presse. Nous attendons la publication des données dans les revues spécialisées. En termes de couverture, la réponse immunitaire du ChAdOx1 sur les personnes âgées est plus ou moins identique à celle des volontaires plus jeunes. Et ce n’était pas évident. Nous sommes optimistes en ce qui concerne les résultats de la phase 3 qui tomberont dans quelques jours.
Les critères d’évaluation sont-ils identiques pour tous les candidats vaccins ?
Pas en ce qui concerne la conservation. Le vaccin de Pfizer, par exemple, doit être conservé à plus de -70°, celui de Moderna à - 20°, le nôtre à 4°, c’est-à-dire dans un frigo normal. Conserver un vaccin à -70° est compliqué, d’où le fait que la Commission européenne a commandé moins de vaccins américains. L’Italie par exemple a commandé 70 millions de doses de ChAdOx1 et 17 millions de doses du vaccin produit par Pfizer en prévision probablement des difficultés de conservation. Je suis certain que les gouvernements trouveront des solutions mais certains pays auront des difficultés sérieuses, ce ne sera pas simple. D’ici juin 2021, AstraZeneca fournira 300 à 400 millions de doses à l’Union européenne qui les partagera entre les pays membres. Le plan prévoit également la production de 3 milliards de doses d’ici fin 2021 pour satisfaire les besoins de plus ou moins les deux cinquièmes de la population mondiale.
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