Mort subite après syndrome coronaire aigu

Comment évaluer le risque ?

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Publié le 03/05/2018
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En 2010, une conférence internationale d’experts a défini deux types de mort subite. Si elle survient devant témoin, le patient s’effondrant brutalement moins d’une heure après l’apparition des premiers symptômes, elle est qualifiée de certaine. Elle est qualifiée de probable si elle survient en l’absence de témoin et/ou moins de 24 heures après le dernier contact avec le patient.

L’arrêt circulatoire commence le plus souvent par une tachycardie, en règle générale ventriculaire, dégénérant en fibrillation ventriculaire, parfois constatée d’emblée. Une minorité de ces arrêts sont liés à un rythme non choquable (1). La fibrillation ventriculaire évolue vers l’asystolie en raison de l’anoxie cellulaire myocardique.

Physiopathologie connue, prévention difficile

La physiopathologie de la genèse de ces arythmies ventriculaires fait intervenir trois facteurs qui composent le « triangle de Coumel » : un substrat arythmogène, le plus souvent une cicatrice d’infarctus à conduction lente, responsable de circuits de réentrée ; une modification du milieu, et un facteur déclenchant ou « gâchette », le plus souvent une extrasystole ventriculaire (2). Dans la population générale, dans 80 % des cas, la cause de mort subite est la cardiopathie ischémique (3).

Dans le contexte de l’insuffisance coronaire chronique, la plupart des marqueurs de risque rythmique ont échoué à identifier les patients qui pourraient bénéficier de l’implantation d’un défibrillateur automatique implantable (DAI) en prévention primaire. Seule la fraction d’éjection ventriculaire gauche, malgré toutes les limites que les auteurs lui reconnaissent, est recommandée et utilisée en pratique quotidienne (4). En prévention secondaire, une occlusion coronaire totale apparaît comme liée au risque rythmique, comme cela a été récemment montré (5).

D’autres techniques de stratification du risque de mort subite, comme l’analyse de l’enregistrement ECG de longue durée selon la méthode de Holter, l’étude de la variabilité sinusale, la recherche des potentiels tardifs ventriculaires ou d’une alternance de l’onde T, ne sont pas préconisées en pratique courante par les recommandations de la Société européenne de cardiologie (6). L’intérêt pronostic de la stimulation ventriculaire programmée (SVP), davantage utilisée aux États-Unis qu’en Europe, reste discuté, mais elle est recommandée en cas de syncope chez un coronarien connu.

Chez les patients sans ischémie, le rôle du DAI a été attesté par une méta-analyse qui a porté sur 8 567 patients ayant une dysfonction ventriculaire gauche, d’origine ischémique ou non (7). Elle a mis en évidence une réduction significative de la mortalité de 24 %, que l’insuffisance cardiaque soit ischémique ou non.

Ainsi, l’évaluation du risque de mort subite après infarctus est essentiellement fondée sur l’étude de la fonction ventriculaire gauche. De nouveaux outils de stratification du risque rythmique, spécifiques à chaque phénotype, doivent être développés.

D’après la communication du Pr Jean-Luc Pasquié (Montpellier)
(1) Bayes de Luna A et al. Am Heart J 1989;117(1):151-9
(2) Coumel P. J Cardiovasc Electrophysiol 1993;4(3):338-55
(3) Waldmann V et al. Ann Cardiol Angeiol (Paris) 2017;66(4):230-8
(4) Moss AJ et al. N Engl J Med 2002;346(12):877-83
(5) Nombela-Franco L et al. JACC Cardiovasc Interv 2017;10(9):879-88
(6) Priori SG et al. Eur Heart J 2015;36(41):2793-867
(7) Shun-Shin MJ et al. Eur Heart J 2017;38(22):1738-46

Dr Gérard Bozet

Source : Le Quotidien du médecin: 9662