DANS LE CADRE de son pacte territoire-santé, Marisol Touraine s’était engagée fin 2012 à favoriser le déploiement de la télémédecine, en citant la dermatologie. Aujourd’hui, les travaux du comité stratégique de filière des industries de santé, mis en place conjointement par les pouvoirs publics et les industriels du secteur, devraient permettre, selon ces derniers, « de donner à la télémédecine un nouvel élan et d’arrêter les financements ».
Priorité au suivi des pathologies chroniques.
Conscients des opportunités, le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (SNITEM) et le Syntec numérique (chambre professionnelle des entreprises de service du numérique) prennent l’initiative. Ils ont rendu public un livre blanc intitulé « Télémédecine 2020, modèles économiques pour le télé suivi des maladies chroniques » qui sonne comme une invitation à changer de braquet, en passant de l’expérimentation à des projets pilotes à grande échelle.
« S’il y a un secteur d’activité dans lequel le numérique peut apporter une valeur ajoutée, c’est bien celui de la santé », estime Guy Mamou-Mani, président du Syntec numérique. Encore faut-il savoir par où commencer. La France s’est certes dotée en 2010 d’un décret décrivant les actes médicaux relevant de la télémédecine, les conditions de son exercice et le cadre organisationnel et financier. Mais les industriels jugent que ce cadre est « insuffisant pour assurer la pérennité de la télémédecine ». Pour Pierre Leurent, président du groupe de travail Télémédecine au Syntec numérique, le principal frein au développement de ces technologies réside dans « l’absence de nouveaux modes d’organisation des professionnels de santé et le manque de modèle économique viable ».
Ce livre blanc, axé sur le suivi des pathologies chroniques, propose plusieurs scénarios de financement de la télémédecine à partir de 6 expériences étrangères. Trois se sont déroulées en Allemagne et aux Pays-Bas sur le suivi de patients atteints d’insuffisance cardiaque ; deux en Italie et au Danemark sur la BPCO ; une aux États-Unis sur le suivi de patients atteints de pluripathologies. Les résultats, cette fois, sont tangibles. Telle expérience met en évidence une amélioration de la santé de 10 % des patients impliqués, une autre permet une réduction de 23 % du coût du traitement par patient, et une dernière procure une baisse de 25 % de la consommation de ressources hospitalières.
Même si ces cas ne sont pas transposables tels quels en France (chaque système de santé étant différent), le livre blanc propose divers scénarios (modélisés) de prise en charge de la télémédecine, en fonction du profil et des choix de l’organisme payeur.
Dans l’un des scénarios, le financeur rembourse tout ou partie des prestations de télémédecine inscrites au panier de soins - parfois à l’acte, parfois au forfait - dans le cadre d’un protocole à durée déterminée. Les complémentaires remboursent tout ou partie du ticket modérateur, et le médecin traitant joue le rôle de « gatekeeper » dans le cadre d’un contrat avec l’organisme payeur public (qui a la possibilité de valider un vrai parcours de télémédecine).
Forfait innovation télémédecine dès 2014.
Il y a loin de la coupe aux lèvres. En attendant cette prise en charge protocolisée, le libre blanc énumère des recommandations. Parmi elles, la sélection et le déploiement de quelques « projets champions » dans des domaines thérapeutiques variés qui se verraient affecter des nouveaux modes de financement.
« Ces pilotes existent, assure le livre blanc, ils pourraient passer à un stade de généralisation qui permettrait d’avoir des méthodologies d’évaluation fiables et de tester des modalités de financement innovantes ».
Il préconise l’adoption dès 2014 d’un « forfait innovation télémédecine ». Il permettrait d’expérimenter en les payant des actes de télémédecine innovants, en fixant des volumes plafond de bénéficiaires.
Pour Jean-Bernard Schroeder, un des responsables du SNITEM, c’est à ce prix qu’« il sera possible d’améliorer la qualité de vie, de mieux soigner dans un cadre de dépenses contraint, et de développer une nouvelle filière industrielle de croissance ».
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