« Faire oublier aux patients qu'ils sont à l'hôpital » : voyage inaugural à la clinique Saint-Jean

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Publié le 17/07/2020
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Fin de chantier dans le hall d'entrée arboré

Fin de chantier dans le hall d'entrée arboré
Crédit photo : DR

La Méditerranée étant aux portes de la nouvelle clinique Saint-Jean (Hérault), des stickers évoquant la mer, les vacances et les jouets de plage orneraient avec goût les murs du service de pédiatrie, imaginait Marie Lebecq, l'architecte en charge du projet de reconstruction de l'établissement. 

Les médecins en ont décidé autrement : l'eau, c'est l'angoisse de la noyade assurée. Et le gentil requin de Rackham le Rouge pour le côté aventurier ? « Trop de dents ». De guerre lasse, l'architecte a opté pour des montgolfières aux tons doux, « parce que c'est l'envol, l'espoir ». Aux urgences, elle voulait tout sauf du rouge « qui rappelle le sang ». C'est pourtant le code couleur réclamé par Cap santé, le groupe de cliniques propriétaire de ce nouveau bâtiment transféré du centre-ville de Montpellier à Saint-Jean-de-Védas. « On m'a dit : le vert, c'est pour la pharmacie, se souvient-elle aussi. Médecins et architectes n'ont vraiment pas les mêmes codes. Quand on construit un service, on regarde les mêmes choses mais on ne les voit pas de la même façon. Ça réclame donc beaucoup de discussions. »

À raison de deux à trois réunions par semaine pendant de long mois entre les cadres de santé et l'agence A+Architecture, la clinique Saint-Jean pourra accueillir des patients sur son nouveau site le 20 août.

Évolutivité totale

Si, en cette fin du mois de juin, les peintres mettent un dernier coup de blanc aux murs et les électriciens finalisent la pose de luminaires dans les chambres VIP, le gros du chantier est terminé. « C'est une aventure humaine qui a pris neuf ans, le temps normal pour qu'une clinique sorte de terre », analyse Lamine Gharbi, patron de Cap Santé et de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP).

Le Covid étant passé par là, les architectes ont ajouté un quatrième étage et un service de réanimation, au cas où l'ARS déciderait de délivrer une autorisation à la clinique. « Au départ, on était parti sur 19 000 m2, on finit avec 25 000 m2, sans compter le pôle de consultations annexe. Un établissement comme ça ne peut pas être figé, il fallait l'imaginer avec une extension de l'imagerie, du nombre de places et de lits [de 251 aujourd'hui à 347 si besoin, NDLR], des blocs, de nouveaux services en fonction des retours d'expérience et de la pratique des médecins », justifie Laurent Ramon, directeur général du groupe Cap Santé et de la clinique Saint Jean.

No bed express

Côté prise en charge, l'architecture a été pensée pour favoriser la RRAC (récupération rapide après chirurgie) et la chirurgie ambulatoire. Une vaste salle est consacrée au no bed express, un nouveau service où les patients ne restent qu'une à trois heures dans des alcôves individuelles après certains types de chirurgie, comme la cataracte. 

Dans les couloirs, les murs sont blancs et taupe, les portes et les têtes de lits en stratifié bois couleur wengé. « Nous avons emprunté les codes de l'hôtellerie pour sortir d'une vision architecturale passée, trop hygiéniste, qui alimente la peur du soin et du médecin, explique Frédéric Nguyen, autre architecte en charge du projet. On a tout fait pour faire oublier aux patients qu'ils sont à l'hôpital. »

Les architectes ont également pensé aux 180 médecins libéraux de la clinique. Les 26 blocs sont éclairés par la lumière du jour et la résine au sol, « plus qualitative et plus résistante », est égayée par un jaune ensoleillé. Toutes les salles respectent les mêmes normes pour permettre une « évolutivité totale » et éviter aux chirurgiens d'être bloqués dans leur pratique (si elle réclame par exemple un équipement en radiologie), précise Frédéric Nguyen. « Nous, les archis, on aime l'épure et la lumière naturelle, confirme Marie Lebecq. C'est pour cela qu'ici, la réa n'est pas aveugle. On est persuadé que cela a un impact sur les patients, mais aussi et surtout sur leur famille. La lumière, c'est la vie. » 

Anne Bayle-Iniguez
CHU

Source : Le Quotidien du médecin