L’accès aux soins et à des services de santé de qualité est une préoccupation majeure pour l’ensemble des Français, quel que soit leur lieu de vie. Or, force est de constater que la situation se dégrade d’année en année, les inégalités territoriales ne cessant de se creuser.
Toutes spécialités confondues, 86 départements ont enregistré une baisse de la densité médicale entre 2007 et 2016. En quatre ans, plus d’un quart des Français ont vu diminuer le nombre de médecins généralistes accessibles à moins de trente minutes en voiture. Le temps d’attente pour obtenir un rendez-vous n’a fait qu’augmenter ces dernières années : deux Français sur trois renoncent désormais à des soins à cause des délais d’attente.
Tensions sur l'offre de soins
Plus grave encore, ces tensions sur l’offre de soins ne vont faire que s’accroître au cours des prochaines années du fait de la baisse des effectifs de médecins prévue jusqu’en 2027. À cela s’ajoute la transformation de la manière de travailler principalement du fait des variations passées du numerus clausus, du vieillissement de la population médicale et de la profonde transformation de la manière de travailler des jeunes praticiens. On estime aujourd’hui qu’il faut au moins 1,5 médecin pour remplacer un départ en retraite.
Dans le même temps, selon la DRESS (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère de la Santé), la demande de soins va augmenter du fait du vieillissement de la population et l’accroissement des maladies chroniques, jusqu’en 2027.
Le plan gouvernemental ne changera pas la donne
Si les élus se mobilisent dans tous les territoires concernés pour trouver des solutions, cela ne suffit pas. Il appartient en effet à l’État d’agir. Or les mesures mises en place depuis 25 ans par celui-ci ont prouvé leur insuffisance.
Le bilan des dispositifs incitatifs est pour le moins très « modeste ». Les maisons de santé pluri-professionnelles, bientôt au nombre de 1000, permettent localement de résoudre un certain nombre de situations, mais restent coûteuses et parfois même sont sans médecin… Elles ne peuvent donc pas constituer une réponse unique.
Le plan annoncé par le Gouvernement en s’inscrivant dans la même logique que celle de ses prédécesseurs ne produira pas d’avantage de résultats significatifs et la situation continuera à s’aggraver. J’en fais aujourd’hui le pari !
Il faut prendre des mesures plus énergiques
Nos concitoyens, eux, demandent des résultats. C’est pourquoi, avec nombre d’autres parlementaires, de plus en plus nombreux, je suis plus que jamais convaincu qu’il nous faut prendre des mesures plus énergiques comme je le propose depuis maintenant près de 10 ans.
Ainsi, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat demande parmi d’autres mesures (la modification des études de médecine pour faire découvrir aux futurs médecins la médecine libérale, la délégation d’actes…), la mise en place d’un conventionnement sélectif tel qu’il existe déjà pour un certain nombre de professions de santé (kinésithérapeutes, infirmières…).
Nous suggérons -comme l’a fait à nouveau il y a quelques jours la Cour des Comptes- de réguler les installations dans les zones surdotées en interdisant le conventionnement d’un médecin lorsque son installation n’est pas gagée par une cessation d’activité. Des amendements parlementaires ont été présentés et adoptés tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, mais toujours écartés lors des votes définitifs des projets de loi dans lesquels ils s’inséraient. C’est regrettable.
Toute liberté doit être régulée
Cette proposition ne remet pas en cause la liberté à laquelle je suis attaché, mais comme toute liberté, elle doit être régulée et soumise à un principe supérieur à tout autre, un principe à valeur constitutionnelle, l’intérêt général.
Quelles que soient les réticences d’un certain nombre de médecins à cette proposition, elle mérite d’être aujourd’hui expérimentée car la situation exige désormais des mesures courageuses et fortes, pour éviter la multiplication de drames sanitaires.
* Sénateur de l’Eure, Président de la Commission de l’Aménagement du territoire et du développement durable du Sénat
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