La peau est un organe polarisé et en présence d’une plaie, il se forme un courant dit de plaie qui stimule la cicatrisation, mais qui est altéré dans les plaies chroniques. L’application d’un courant électrique au niveau de la plaie a démontré son intérêt dans quelques études : la stimulation de l’angiogenèse, la migration et la prolifération des macrophages, des fibroblastes et des kératinocytes favorisent la détersion et le bourgeonnement.
L’expérience acquise a également permis de mettre en évidence une réduction de la douleur indépendamment de l’impact bénéfique sur le processus de cicatrisation.
« L’électricité a une action sur la régénération des fibres nerveuses et l’électrostimulation est utilisée par voie transcutanée dans les douleurs neuropathiques », rappelle le Dr Hervé Maillard. Par ailleurs, comme l’ont souligné différentes études, on observe après électrostimulation une augmentation de la TcPO2 (pression transcutanée en oxygène), en lien avec un accroissement de la densité capillaire favorisée par la migration des fibroblastes et la stimulation des cellules endothéliales. Ceci conduit à une réduction de l’ischémie, ce qui est un facteur très important dans certains ulcères de jambe très douloureux observés notamment en cas d’angiodermite nécrotique.
« Les données de la littérature sur l’effet antalgique de l’électrostimulation dans les ulcères de jambe étaient jusqu’alors limitées. Nous avons réalisé une étude rétrospective (acceptée pour publication dans International Wound Journal) ) qui a inclus entre 2011 et 2013 73 patients (médiane d’âge de 77 ans) suivis dans trois centres (Le Mans, Talence et Malestroit), en hospitalisation classique ou en hospitalisation à domicile », expose le Dr Hervé Maillard. Ils souffraient de différents types d’ulcères (veineux, mixtes, angiodermite nécrotiques…) évoluant depuis plusieurs mois (médiane 12 mois).
Dès le 3e jour
L’efficacité antalgique de l’électrostimulation par "pansement électrique" (posé directement sur la plaie), évaluée à l’aide d’une échelle analogique, est apparue précocement, dès le 3e jour, et s’est maintenue durant le suivi (7 à 9 jours). La consommation d’antalgiques de palier 2 et 3 a parallèlement été réduite, y compris dans le sous-groupe de patients avec une angiodermite nécrotique, pathologie pouvant être particulièrement douloureuse. Cette action antalgique s’accompagne d’une détersion non traumatique, « ce qui peut permettre pour certains patients de proposer assez rapidement une greffe ou un traitement par pression négative ».
« Cette approche, que nous proposons depuis quelques années d’emblée chez les patients ayant un ulcère hyperalgique, à raison d’une séance de 30 minutes matin et soir, est très bien tolérée. La sensation de paresthésies induites au niveau de la plaie sert à calculer l’ampérage nécessaire. Cette technique, dont les bénéfices vont être évalués à plus large échelle, est notamment contre-indiquée chez les sujets porteurs d’un pace-maker, et plus largement de matériel métallique comme des clips vasculaires », conclut le Dr Maillard.
D’après un entretien avec le Dr Hervé Maillard, Centre hospitalier, Le Mans.
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