Les techniques de biologie moléculaire, comme la Droplet Digital PCR, permettent d’identifier plus précisément l’ADNtc dans le sang. Ces biopsies liquides, étudiées dans diverses tumeurs digestives, pourraient permettre le diagnostic moléculaire et la surveillance tout en étant moins invasives.
Pour le CCR, la quantité d’ADNtc étant proportionnelle au volume de la tumeur, sa recherche n’est pas adaptée au dépistage de masse et très imparfaite pour le diagnostic individuel. Par contre, cette technique se révèle intéressante pour le suivi thérapeutique, en particulier pour rechercher la maladie résiduelle minimale et prédire la récidive.
Un facteur prédictif de rechute
Dans le CCR, la rechute concerne 50 % des patients, mais tombe à 25 % après trois à six mois de chimiothérapie, le point crucial étant de repérer ceux qui doivent en bénéficier. D’après des résultats préliminaires, l’ADNtc semble un facteur prédictif très discriminant, puisqu’on observe des rechutes chez 80 % des patients en sa présence vs 20 % en son absence.
L'étude internationale IDEA a été menée chez plus de 10 000 patients atteints de cancers de stade III, à bas risque de récidive (T1, 2 ou 3, N1 et M0, soit 60 % des CCR de stade III). Elle montre la possibilité de réduire la durée de la chimiothérapie adjuvante de six à trois mois, limitant ainsi la toxicité (notamment neurologique de l’oxaliplatine) sans conséquences délétères sur le plan tumoral (analyse finale présentée fin mai à l'ASCO) [1].
Les données issues des 1 000 patients français d’IDEA, chez lesquels l’ADNtc a été étudié après exérèse tumorale, seront présentées lors des e-JFHOD. L'ADNtc a été retrouvé chez 15 % des malades, un peu moins que dans la littérature (20 %) mais il s’agissait d’une analyse post-hoc, pas prévue initialement dans l'étude. On a pu montrer qu’il constitue un facteur pronostic indépendant de tous les autres (2). En effet, le pronostic des patients avec de l’ADNtc est bien plus mauvais, quel que soit leur groupe de risque. « Rechercher l’ADNtc ajoute un autre facteur décisionnel potentiel, qui nous incite à penser qu’une durée de trois mois de chimiothérapie n’est pas optimale en présence d’ADNtc, y compris chez les patients à bas risque, insiste le Pr Julien Taieb (HEGP, Paris). Ces résultats confortent la valeur pronostique de l’ADNtc, qu’il faudra confirmer par d’autres études sur IDEA et ouvrent la voie à son utilisation pour guider la stratégie thérapeutique dans les prochains essais sur les traitements adjuvants du CCR ». Des études sont en cours sur cette nouvelle façon de gérer les CCR, une française dans les stades II et une européenne dans les stades III.
L’ADNtc permet aussi d’établir le profil moléculaire de la tumeur de façon fiable en cas de métastases hépatiques, un peu moins si elles sont pulmonaires ou péritonéales sans localisation hépatique. « Dans une étude que nous avons menée chez 400 malades, le profil moléculaire de l’ADNtc concordait avec celui de la tumeur chez plus de 90 % d’entre eux », note le spécialiste.
(1) Sobrero A.F. et al. ASCO 2020, abstr 4004
(2) Taieb J. et al. ESMO 2019, abstr LBA30_PR
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