« Les hyperplasies macronodulaires bilatérales des surrénales (HMBS), responsables d’un syndrome Cushing, sont caractérisées par des nodules de très grande taille contrastant avec le caractère souvent modéré de l’hypercortisolisme. Elles sont très rares (moins de 1 % des Cushing). Plusieurs travaux sont venus néanmoins éclairer leur physiopathologie », résume le Pr Hervé Lefebvre (CHU de Rouen).
Sécrétion ectopique d’ACTH par défaut de maturation embryonnaire
Des chercheurs canadiens avaient déjà montré que la sécrétion de cortisol par ces hyperplasies pouvait être anormalement stimulée dans ces tumeurs, par différentes hormones, notamment la LH ou le GIP. « Nous avons mis en évidence l’implication d’une amplification de boucles paracrines de régulation du cortisol, liée à une sécrétion ectopique de facteurs stimulants comme la sérotonine. Mais, surtout, nous avons découvert qu’une synthèse intrasurrénalienne d’ACTH est présente dans 100 % des cas dans une série de 30 hyperplasies (1), souligne le Pr Lefebvre. Ces cellules ACTH(+) expriment des marqueurs gonadiques. Or, pour mémoire, surrénales et gonades dérivent du même tissu embryonnaire. Un reste de cellules gonadiques, fruit d’un défaut de maturation du tissu précurseur gonadosurrénalien, pourrait donc être à la source de cette maladie bilatérale ».
«Et, comme des antagonistes de l’ACTH se sont montrés actifs in vitro sur la sécrétion de cortisol dans ces hyperplasies, on espère à l’avenir pouvoir traiter les patients avec ces molécules et éviter ainsi la chirurgie ablative, qui constitue aujourd’hui le traitement de référence », indique-t-il.
Mutation germinale et somatique d’ARMC5
La nature bilatérale et l’existence de cas familiaux faisaient depuis longtemps suspecter une implication génétique. Récemment, les travaux menés à l’Institut Cochin par l’équipe de Jérôme Bertherat en ont fait la preuve. Le gène ARMC5 (Armadillo Repeat Containing 5) joue un rôle majeur. « Plus de 50 % des patients sont porteurs d’une mutation germinale inactivatrice hétérozygote d’ARMC5 (2). Au sein des nodules, ARMC5 est totalement inactivé, conséquence d’un second événement génétique (mutation, délétion), quant à lui de nature somatique, précise le Pr Lefebvre. ARMC5, jusqu’alors inconnu, apparaît donc comme un gène suppresseur de tumeur. Il a été plus récemment impliqué dans le développement de méningiomes bénins présents dans certains cas familiaux d’HMBS. Les mutations d’ARMC5 pourraient donc être à l’origine d’un nouveau syndrome de néoplasies multiples, associant HMBS et méningiome ».
«Quoi qu’il en soit, la découverte d’ARMC5 offre la possibilité d’offrir un dépistage génétique de l’HMBS chez les apparentés aux patients atteints ; dépistage d’autant plus intéressant que ces hyperplasies se développent généralement à bas bruit sur plusieurs années », rappelle le Pr Lefebvre.
D’après un entretien avec le Pr Hervé Lefebvre (CHU de Rouen)
(1) Louiset E et al. Intraadrenal Corticotropin in Bilateral Macronodular Adrenal Hyperplasia. NEJM, 2013 ;369:2115-25
(2) Assié G et al. ARMC5 Mutations in Macronodular Adrenal Hyperplasia with Cushing’s Syndrome. NEJM, 2013;369:2105-14
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