Les essais internationaux PROMINENT, REDUCE-IT ou STRENGTH, menés chez des patients atteints d’athérosclérose ou à haut risque traités par statines, ont permis de tirer des conclusions : le risque inflammatoire résiduel semble être plus fortement associé à de futurs événements CV que le risque résiduel lié au LDL-C, ce qui pourrait amener à associer des traitements hypolipémiants et anti-inflammatoires dans l’athérosclérose.
Cibler l’inflammation
L'analyse des essais PROMINENT (n = 9 988), REDUCE-IT (n = 8 179) et STRENGTH (n = 13 078) a inclus 31 245 patients traités par statines (1). L’objectif était de déterminer la part respective de l’inflammation, évaluée par la protéine C réactive haute sensibilité (hsCRP), et du LDL-C dans le risque d’évènements CV majeurs (MACE). Le risque inflammatoire résiduel était significativement associé à la survenue des MACE (dans le quartile de hsCRP le plus élevé par rapport à celui le plus bas, HR = 1,31 ; p < 0,0001), la mortalité CV (HR = 2,68 ; p < 0,0001) et la mortalité de toutes causes (HR = 2,42 ; p < 0,0001). En revanche, la relation entre le risque lié au cholestérol résiduel était neutre pour les MACE (HR = 1,07 ; p = 0,11), et de faible ampleur pour les décès CV (HR = 1,27 ; p = 0,0086) ou les décès toutes causes confondues (HR = 1,16 ; p = 0,025).
L’inflammation (évaluée par la hsCRP) était un meilleur facteur prédicteur du risque d'événements CV futurs et de décès que le cholestérol (évalué par le LDL-C), chez les patients recevant des statines. Le risque inflammatoire résiduel semble être plus fortement associé à de futurs événements CV que le risque résiduel lié au cholestérol. « Ce qui ne remet pas en question la nécessité de réduire les lipides chez les patients gardant une hypercholestérolémie sous statines, mais suggère que le ciblage du LDL-C seul peut ne pas suffire à limiter le risque d'athérosclérose, tempère le Dr Paul M. Ridker. Viser aussi l’inflammation pourrait apporter un bénéfice supplémentaire. L’association de traitements hypolipidémiants et anti-inflammatoires pourrait bien devenir la norme thérapeutique à l'avenir ».
Une approche plus personnalisée
Chez les coronariens, certaines recommandations préconisent d’instaurer d’emblée des statines à forte dose, afin d’obtenir une réduction d'au moins 50 % du LDL-C. Mais d’autres proposent de débuter par des posologies modérées, avec une titration en fonction des objectifs de LDL-C. L’essai multicentrique sud-coréen LOADSTAR (2) est le premier à comparer directement ces deux stratégies. Les 4 400 patients randomisés recevaient soit une statine de haute intensité (rosuvastatine 20 mg ou atorvastatine 40 mg), soit un traitement ajusté de façon à obtenir un LDL-C compris entre 50 et 70 mg/dl.
Le taux de LDL moyen était similaire dans les deux groupes, autour de 68/69 mg/dl pendant la durée de l’essai. Le taux d’évènements du critère d'évaluation principal (décès, infarctus du myocarde [IDM], AVC, revascularisation coronarienne) était de 8,1 % dans le bras traitement à la cible, versus 8,7 % sous statines à forte dose (p < 0,001 pour la non-infériorité). « Ces résultats apportent des arguments supplémentaires à l'appui de la pertinence d'une stratégie de traitement à la cible, permettant une approche personnalisée tenant compte de la variabilité individuelle de la réponse aux statines », conclut le Pr Myeong-Ki Hong (Séoul).
Une réduction de la dysfonction cardiaque
« Les patients atteints de lymphome, traités par anthracyclines, sont à haut risque de dysfonction cardiaque et d’insuffisance cardiaque (IC), souligne le Dr Tomas G. Neilan (Boston). Ils bénéficieraient d'un traitement par statines. Cette étude amènera à en prescrire davantage chez ces patients » (3).
Dans l’étude multicentrique randomisée, STOP-CA (n = 300), les patients traités par statines étaient à un an moins nombreux à avoir une fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) inférieure à 55 %, ou une chute de la FEVG d’au moins 10 % (9 % versus 22 % sous placebo, p = 0,002). On ne constatait pas de différence significative sur les évènements indésirables. Il reste à déterminer quels types de patients doivent être traités, ainsi que la date d’instauration et la durée optimale du traitement par statines.
1. Ridker PM et al. Lancet 15 April 2023; Vol 401, Issue 10384, 1293-1301
2. Hong S-J et al, JAMA. 2023 Apr 4;329(13):1078-1087
3. Tomas G. Neilan. ACC 2023, Late-Breaking Clinical Trials
4. Nissen SE et al, N Engl J Med 2023 ; 388:1353-1364
5. Christie M. Ballantyne CM et al. ACC 2023, Late-Breaking Clinical Trials V
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