LE DOSAGE de la kaliémie fait partie du bilan biologique à réaliser lors de la découverte d’une hypertension artérielle (HTA), et doit être répété au cours du suivi du patient. La découverte d’une hypokaliémie (confirmée par deux dosages) doit déclencher un certain nombre d’explorations visant à établir son origine rénale ou non. « La valeur seuil pour parler d’hypokaliémie est de 3,5 mml/l en l’absence de traitement et de 3,7 mmol/l (voire 3,9 mmol/l pour certains) chez un patient sous bloqueur du système-rénine-angiotensine-aldostérone ou en cas d’insuffisance rénale », a rappelé le Pr Jean-Pierre Fauvel. Les conditions de prélèvement doivent être rigoureuses : sous régime normosodé, sans supplémentation potassique, à distance d’un effort musculaire, sans contraction du poing et sans garrot.
Lorsque l’hypokaliémie est certaine, il importe d’évaluer la fuite potassique rénale (plus de 90 % de l’excrétion de potassium est urinaire), ce qui se fonde sur le dosage de la kaliurèse des 24 heures (avec la natriurèse et la créatininurie pour valider le recueil). Si cette dernière est ‹ 20 mmol, l’origine de la perte potassique est extrarénale et probablement digestive (vomissements, laxatifs, tumeur villeuse, etc.).
A l’inverse, une kaliurèse des 24 heures› 20 mmol signe une perte potassique d’origine rénale et conduit à explorer le système rénine-aldostérone. Pour être interprétables, les dosages de rénine et d’aldostérone doivent être réalisés dans des conditions très strictes : correction du déficit potassique (car l’hypokaliémie peut freiner la sécrétion d’aldostérone), décubitus depuis au moins une heure, régime normosodé, neutralité thérapeutique.
Les résultats permettront alors de s’orienter soit vers un hyperaldostéronisme primaire (adénome de Conn, hyperplasie idiopathique surrénalienne uni- ou bilatérale), soit vers un hyperaldostéronisme secondaire (lié notamment à une sténose de l’artère rénale ou une tumeur à rénine), une intoxication à la réglisse, un hypercortisolisme (syndrome de Cushing franc ou fruste, corticosurrénalome) ou une cause génétique (hyperaldostéronisme sensible à la dexaméthasone, excès apparent en minéralocorticoïdes ou apparent mineralocorticid excess des Anglo-saxons [AME], avec un déficit ou une diminution marquée de l’activité de la 11 bêta-hydroxystéroïde déshydrogénase de type 2 (11 bêta-HSD2), syndrome de Liddle, généralement dépisté en pédiatrie).
Sténose de l’artère rénale.
La réalisation du bilan d’une HTA peut conduire à la découverte d’une sténose de l’artère rénale, dont deux types doivent être distingués.
La sténose secondaire à une dysplasie fibromusculaire, dont la mise en évidence impose de rechercher des lésions associées asymptomatiques, en particulier cervico-encéphaliques (présentes dans de 20 à 30 % des cas). L’interrogatoire du patient permet de retrouver un antécédent familial (HTA précoce, dissection, AVC...) dans de 10 à 15 % des cas.
Dans ce cadre, comme cela a été bien souligné par une méta-analyse récente (1), une angioplastie (préférentiellement sans pose de stent) doit être réalisée chaque fois que possible en présence d’une sténose significative, d’une HTA récente, résistante au traitement ou en cas de souffrance rénale. Le taux de complications est élevé, de l’ordre de 16 %, ce qui souligne l’importance de confier le geste à des mains expertes. Le patient doit bénéficier d’un suivi régulier, car les resténoses sont fréquentes. Si l’angioplastie n’est pas réalisée, le patient doit bénéficier d’une surveillance biologique et rénale annuelle (taille du rein).
Le plus souvent (90 % des cas), il s’agit d’une sténose athéromateuse, pour laquelle une angioplastie avec pose de stent est de plus en plus souvent été réalisée alors que les recommandations américaines de 2005 (American Heart Association et American College of Cardiology) restaient très prudentes sur ses indications potentielles. Deux études publiées depuis remettent en question la place de l’angioplastie :
– STAR (140 patients), qui n’a pas montré de bénéfice de l’angioplastie sur la mortalité, le pronostic rénal et le contrôle tensionnel, le geste ayant entraîné plusieurs accidents mortels ;
– et ASTRAL (800 patients), dans laquelle il y a eu 3 % de complications procédurales graves, sans bénéfice comparativement au traitement médicamenteux, quels que soient les sous-groupes de patients. Parallèlement, les données de registres confirment l’efficacité du traitement par un bloqueur du système rénine-angiotensine. « Nous attendons aujourd’hui les résultats de l’étude CORAL, qui pourraient nous éclairer sur la meilleure stratégie thérapeutique des sténoses athéromateuses de l’artère rénale », a conclu le Pr Guillaume Bobrie.
D’après les communications des Prs Jean-Pierre Fauvel, néphrologue (Lyon) et Guillaume Bobrie, néphrologue (Paris).
(1) Trinquart L et coll. Hypertension 2010;56(3):525-32.
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