En France, le traitement médical de l’hirsutisme a longtemps reposé sur l’acétate de cyprotérone, associé à une estrogénothérapie. C’est en 2009 que le Pr Sébastien Froelich, neurochirurgien à Hôpital Lariboisière (Paris), a publié une première série de neuf patientes, élargie à douze en 2015, d’un âge autour de 50 ans, traitées par acétate de cyprotérone présentant des méningiomes atypiques, situés à la base du cerveau avec une fréquence inhabituelle. Ces méningiomes diminuaient nettement de taille après arrêt du traitement progestatif. L’alerte a ainsi été donnée au niveau national et européen. En 2018, l’ANSM a restreint les indications de l’acétate de cyprotérone aux cas d’hirsutisme sévère chez les femmes non ménopausées.
Un surrisque de méningiome prévalent et incident
Les données de pharmacovigilance européennes ont recensé, en date de juin 2020, 1 117 cas de méningiome sous acétate de cyprotérone, 214 cas sous acétate de chlormadinone et 213 sous acétate de nomégestrol. « Il n’y a pas de surrisque décrit sous progestatifs faiblement dosés ou sous associations œstroprogestatives, y compris celles contenant de l’acétate de cyprotérone (2 mg/j) », précise la Pr Nathalie Chabbert-Buffet (Hôpital Tenon, Paris).
« Une étude récente, publiée en 2021 (1), a confirmé le surrisque de méningiome, prévalent mais aussi incident, chez les utilisatrices actuelles et passées d’acétate de cyprotérone à forte dose (25 à 50 mg/j) avec un effet âge, dose et durée », souligne la spécialiste.
C’est ainsi que la Société française d’endocrinologie (SFE) a mis à jour en 2020 ses recommandations de prise en charge de l’hirsutisme, émises en 2010. Cette mise à jour ne concerne pas les hirsutismes liés à un déficit enzymatique surrénalien ou à une tumeur androgénosécrétante, ni les femmes ménopausées.
En cas d’hirsutisme sévère, acétate de cyprotérone sous étroite surveillance
Les recommandations de la SFE positionnent l’acétate de cyprotérone, associé à un estrogène, en première intention en cas d’hirsutisme sévère invalidant chez la femme non ménopausée.
La spironolactone (hors AMM), sous couvert d’une contraception efficace, est le traitement de deuxième intention, en cas d’effets secondaires, de contre-indication, de refus de la patiente ou d’absence d’efficacité de l’acétate de cyprotérone.
« Les patientes doivent, bien sûr, être informées du risque de méningiome avec l’acétate de cyprotérone : elles le comprennent très bien et acceptent généralement le traitement, tant leur hirsutisme peut être handicapant. Une IRM cérébrale doit être réalisée en préthérapeutique afin de vérifier l’absence de méningiome. La tolérance et l’efficacité du traitement ainsi que la posologie minimum efficace doit être réévaluée régulièrement, à 6 mois, 1 an, puis tous les ans. La balance bénéfice/risque doit être réévaluée avec la patiente régulièrement et la durée du traitement doit être la plus courte possible. Si le traitement est poursuivi pendant plusieurs années, une IRM devra être réalisée au plus tard 5 ans après la première, puis tous les deux ans, si l’IRM à 5 ans est normale », ajoute la Pr Chabbert-Buffet.
« En pratique, chez une femme jeune (d’âge inférieur à 40 ans) atteinte d’hirsutisme sévère, je propose l’acétate de cyprotérone à 50 mg associé l’estradiol pour une courte durée après réalisation de l’IRM. Dès que possible, je prescris une dose plus faible (25 mg/j), puis un relais par un œstroprogestatif », confirme la spécialiste
En cas d’hirsutisme modéré, une contraception œstroprogestative
La contraception œstroprogestative est le traitement de première intention en cas d’hirsutisme modéré de la femme non ménopausée.
À efficacité similaire, on choisira un contraceptif ayant le plus faible risque de maladie veineuse thromboembolique : pilules de 2e génération remboursées (lévonorgestrel + éthinylestradiol, etc.) ou pilules dites de 3e génération à base de norgestimate + EE (non remboursées, mais certains laboratoires ont diminué leur prix).
En l’absence d’efficacité jugée suffisante, la contraception œstroprogestative associée à la spironolactone (hors AMM) peut-être proposée en deuxième intention.
Exergue : Dès que possible, on peut diminuer la dose et proposer un relais œstroprogestatif
Entretien avec la Pr Nathalie Chabbert-Buffet (Hôpital Tenon, Paris)
(1) Weill A et al. Use of high dose cyproterone acetate and risk of intracranial meningioma in women: cohort study. BMJ. 3 févr 2021;372:n37
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