La France s'est donnée jusqu'à 2025 pour éliminer le virus de l'hépatite C (VHC). À cette fin, le traitement universel a été entériné en 2016, chez tous les patients quel que soit le stade de fibrose. La guérison virologique est obtenue dans 95 % à 100 % des cas au moyen des antiviraux à action directe (AAD) en 8 à 12 semaines. Le second impératif pour atteindre l'objectif d'éradication du VHC est d'améliorer le dépistage. À ce jour, les autorités n'ont pas adopté de position formelle en faveur du dépistage universel, comme préconisé par l'Association française pour l'étude du foie (AFEF) en mars 2018 qui recommandait le dépistage pour chaque adulte au moins une fois dans sa vie et la prise en charge à 100 % des tests. On estime pourtant à 75 000 le nombre de personnes porteuses du virus en France et jamais dépistées. Mais sont-elles uniquement issues des populations à risque ?
L'observatoire ANGH KIDEPIST de l'Association nationale des hépato-gastroentérologues des Hôpitaux généraux (ANGH) de France révélé aux JFHOD 2019 apporte des réponses assez inattendues à cette interrogation, en faveur du dépistage pour tous. Au-delà de déterminer le nombre de patients dépistés en population générale, son objectif principal était d'étudier le rôle des différents professionnels de santé dans le dépistage. 35 centres de l'ANGH ont participé, de septembre 2017 à septembre 2018 et ont recruté près de 700 patients de plus de 18 ans. Tous consultaient pour la première fois en hépatologie pour une hépatite chronique C ayant une PCR VHC positive.
Le généraliste, acteur clé du dépistage
Plus de 40 % des patients porteurs chroniques du VHC, issus de la population générale, étaient adressés par le médecin généraliste. Dans un peu moins d'un quart des cas, le patient était repéré par un médecin spécialiste, dans 13 % par les Centres d'addictologie (CSAPA) et les Centres pour usagers de drogue (CAARUD), dans 3 % par le milieu carcéral et dans moins de 1 % par les services de psychiatrie. « Le médecin généraliste est le premier acteur dans le dépistage et l'adressage des patients pour une hépatite C, souligne la Dr Isabelle Rosa, du service de gastroentérologie-hépatologie (CHI de Créteil) et coordinatrice de KIDEPIST. Ce dépistage est réalisé dans 25 % des cas en raison d'anomalies cliniques (asthénie, aspect cirrhotique du foie à l'échographie etc.) ou biologiques (transaminases élevées etc.) et dans près de la moitié des cas dû à l'existence de facteurs de risque (antécédents de toxicomanie, de transfusion, d'incarcération, migrants). Il existe un antécédent de toxicomanie dans 60 % des cas, presque deux fois plus que ce qui est déclaré par le patient avant le dépistage. Nous étions conscients qu'un nombre important de patients infectés VHC se trouvait en population générale, mais ces résultats appuient fortement la nécessité de ne pas limiter le dépistage aux populations à risque, et à impliquer les médecins généralistes ».
Vers un profil type du porteur VHC chronique
Le patient qui reste à dépister est le plus souvent un homme (63 %), d'âge moyen 54 ans et en situation précaire (43 %). « La moitié souffre d'au moins une comorbidité (diabète de type 2, syndrome métabolique, antécédents cardiovasculaires), ajoute la spécialiste, et ne relève pas d'un parcours simplifié mais d'une prise en charge multidisciplinaire. De plus, constat surprenant, un tiers d'entre eux a une fibrose sévère F3-F4, et se trouve déjà à un stade avancé ».
À noter, il s'agissait d'une reprise de suivi pour 20 % des patients et une partie avait déjà été traitée auparavant. Ces patients sont revenus spontanément vers leur généraliste. La médiatisation de l'arrivée des AAD, les campagnes d'information ou le bouche-à-oreille en faveur d'un traitement désormais court et efficace y est probablement pour beaucoup.
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