Après 35 ans

Poursuivre une contraception adaptée

Publié le 12/11/2009
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LE RISQUE de grossesse serait de 10 % chez les femmes entre 40 et 45 ans. Il est de 2,3 % seulement entre 45 et 49 ans où les chances d’ovuler, même après une aménorrhée secondaire d’un an, seraient d’ailleurs de 10 %. Les statistiques publiées en France par l’Institut national d'études démographiques (INED ; Toulemon, 1993) mettent en évidence après 50 ans, la survenue par an de 30 naissances, de 45 interruptions volontaires de grossesse (IVG) et de 25 fausses couches spontanées. C’est dire la nécessité de poursuite d’une contraception adaptée à cette tranche d’âge.

En France, la préférence va au DIU : 29,6 % contre 28 % pour les estroprogestatifs, 6,7 % pour les préservatifs et 16,3 % pour les stérilisations. En Grande-Bretagne, la stérilisation est majoritaire devant le préservatif, les pilules et stérilets venant loin derrière (42 %, 29 %, 8 %, 9 %). Même si le nombre de demandes d’IVG stagne en France, il y en aurait eu, pour la tranche 35 à 49 ans, environ 42 800 pour un total de 210 664 en 2006.

Grossesses de plus en plus tardives.

L’âge de la première grossesse dans nos pays dits civilisés est de plus en plus tardif. Il est certain que les risques maternels et fœtaux augmentent avec l’âge.

La baisse de la fécondité pourrait inciter à se contenter de méthodes contraceptives relativement efficaces (contraception vaginale…). En fait, les femmes à cet âge ne veulent courir aucun risque. La méthode choisie devra donc être sûre et respecter les particularités de chacune (risques métaboliques, traitements en cours, risques infectieux).

La préménopause peut, physiologiquement, se diviser en deux phases : l’une est caractérisée par l’existence d’une hyperestrogénie relative. C’est la période de prédilection des mastopathies bénignes, des fibromes utérins, des hyperplasies endométriales et polypes, des kystes fonctionnels ovariens. Les cycles sont courts, les ménométrorragies fréquentes. Les plaintes concernent souvent l’irritabilité, la rétention d’eau, les tensions pelviennes, le syndrome pré menstruel, l’hyper androgénie. La seconde période est plutôt hypoestrogénie. Les cycles sont irréguliers, se rallongent et les règles sont moins abondantes. La tendance est à l’asthénie, à la dépression. Le vagin devient sec.

• Les contraceptifs oraux

Ils sont efficaces et vont avoir l’avantage de traiter les déséquilibres hormonaux, de rétablir des cycles réguliers, d’agir sur le syndrome pré menstruel. Cette « contraception traitement » est souvent la bienvenue à cette période. Il est également reconnu que cette contraception peut avoir des effets bénéfiques : diminution des cancers de l’ovaire, de l’endomètre et du côlon. En revanche, aucune étude à ce jour n’a vraiment fait la preuve de son effet sur la survenue d’un cancer du sein. Enfin, les estrogènes ont un effet sur le climatère et sur l’os.

On a observé chez les femmes en périménopause une densité minérale osseuse (DMO) supérieure en cas de prise d’estroprogestatifs par rapport aux femmes contrôlées n’en prenant pas. Mais c’est la période où le risque cardio-vasculaire et métabolique est à son apogée. Le respect des contre indications s’impose ici expressément.

En cas de prescription ou de renouvellement, la mise en balance des bénéfices et des risques est essentielle. D’ailleurs, en décembre 2004, l’Agence nationale d'accréditation et d’évaluation en santé (ANAES : actuelle Haute Autorité de santé) précisait que les risques de cancer et cardio-vasculaire augmentent avec l’âge surtout en préménopause. La prescription de contraceptifs oraux doit être réévaluée entre 35 et 40 ans (niveau de preuve 2, grade B). En cas de risque, l’Agence recommandait à cette même date la substitution des estroprogestatifs par un DIU ou un progestatif seul, surtout si la femme fume, la stérilisation tubaire pouvant être envisagée.

En fait, l’âge seul n’est pas l’élément le plus important. Il faut repérer les facteurs de risque entrant dans la définition du syndrome métabolique : obésité ; HTA ; tabac ; antécédents thromboemboliques artériels ou veineux ; périmètre ombilical › 80 cm ; triglycérides ›1,5 ; pression artérielle ›130/85 mmHg ; hyperglycémie modérée à ce jour (1,10 à 1,26 g/L). Vingt pour cent des femmes sont concernées. Chez ces femmes, le risque cardio-vasculaire est multiplié par 2 ou 3. Le suivi biologique (glycémie, cholestérol…) devra être demandé régulièrement. L’espace entre deux examens sera plus rapproché que chez les femmes plus jeunes.

Les pilules minidosées seront privilégiées : pour le Dr Serfaty, 15 à 30 gamma d’éthinylestradiol associant un progestatif de troisième génération (gestodène, désogestrel, norgestimate ou drospirenone) s’il s’agit d’une ancienne utilisatrice.

Si la prescription d’estroprogestatif est nouvelle, les Anglais recommandent de débuter par un progestatif de deuxième génération.

Les pilules utilisant le 17 ß-estradiol ou le valérate d’estradiol sont une innovation en la matière. Sur un plan théorique, elles auraient moins d’effet délétère sur les paramètres métaboliques et le système cardiovasculaire. Leurs contre-indications sont les mêmes que celles à l’éthinylestradiol. La première vient d’être mise sur le marché (Qlaira), la seconde devrait voir le jour en 2010.

Les associations estroprogestatives non orales sont également intéressantes à envisager. Le patch à changement hebdomadaire (EVRA : norelgestromine 6 mg/éthinylestradiol 600 µg ; 20 µg EE par jour) est souvent délaissé au profit de l’anneau vaginal (Nuvaring 15 µg d’éthinyl estradiol (EE) et 120 µg d’étonogestrel/jour) diffusant des doses d’estrogènes moins importantes et se changeant une fois par mois.

L’utilisation des pilules microdosées progestatives ne trouve théoriquement pas sa place à cet âge (mauvais contrôle du cycle, métrorragies). Pourtant, cette pilule est très utilisée dans les pays anglo-saxons.

L’implant à l’étonogestrel (Implanon) va modifier le profil des saignements et perturber des cycles qui ont déjà tendance à l’être ! Bien que très efficace, il demeure peu adapté à ce moment de la vie. Son interaction avec la masse osseuse n’est d’ailleurs pas suffisamment documentée.

Les progestatifs normodosés sont parfois utilisés (contraception macroprogestative) pendant 20 à 21 jours en raison de leur action antigonadotrope. Attention, ils n’ont pas l’AMM pour cette indication. Néanmoins, ils sont souvent utilisés en cas de « médico-contraception » dans le cas de ménométrorragies, hyperplasies endométriales, mastodynies, adénomyose… Les cycles sont souvent mal contrôlés. Leur relation avec le métabolisme osseux est très controversée.

• Les dispositifs intra-utérins (DIU)

C’est actuellement la contraception la plus utilisée après 40 ans en France. À l’âge où la vie sexuelle est souvent plus stable, le risque infectieux est souvent plus faible, mais il ne faut pas l’exclure chez les patientes ayant de nombreux partenaires. Les DIU au cuivre sont souvent responsables de règles plus abondantes et plus longues. Il vaut mieux donc ne pas les conseiller s’il existe des ménorragies avec ou sans fibrome. Si le dispositif a été posé, il ne faut pas mettre ces saignements uniquement sur le compte de sa présence : une pathologie génitale associée est à éliminer en priorité (cancer, fibrome, adénomyose…). La majorité des auteurs recommandent de ne plus les changer après 45 ans. Ils seront retirés après 50 ans s’il existe une aménorrhée de plus d’un an, voire avant 50 ans si l’aménorrhée est supérieure à 2 ans.

Le système intra-utérin (SIU) au levonorgestrel (Mirena) est recommandé en cas de ménorragies et/ou de dysménorrhée. C’est actuellement celui qui est le plus fréquemment employé. Il va entraîner une diminution, voire une disparition des règles. Certaines patientes apprécient, d’autres non. Il peut s’accompagner d’acné ou d’hyperséborrhée. Une étude n’a pas montré de différence s’agissant de la densité osseuse chez les femmes utilisant un DIU au cuivre ou un SIU au lévonorgestrel (Bahamondes lx ; Human Reprod 2006). À ce jour, il n’a pas été montré une relation quelconque avec une augmentation de l’incidence du cancer du sein. Pour le Dr Serfaty, le SIU au lévonorgestrel peut être gardé 7 ans chez les femmes de plus de 45 ans permettant « d’assurer une continuité entre contraception et THS ».

Les autres méthodes reposant sur la détection de l’ovulation (courbe de température…) n’ont aucun intérêt à cet âge en raison de l`irrégularité des cycles. La contraception vaginale ne trouve son intérêt que si la femme ne présente aucun signe de pré ménopause.

• La contraception d’urgence

Elle a les mêmes indications pour tous les âges.

Sources

- Contraception : la contraception oestro-progestative chez les quadras : quelle balance bénéfice-risque ? Catherine Azoulay – MGEN, Paris - REFLEXION- septembre 2008 tome I ;

- Quelle contraception prescrire après l’âge de 40 ans ? Dr David Serfaty, Président de la Société française de gynécologie. Profession Gynécologue – avril 2009-10-22 ;

- CNGOF – Mises à jour en gynécologie médicale : contraception des femmes de plus de 53 ans. David Serfaty. 2002.p.73 ;

- Brigitte Letombe – 29es journées de l’AFEM sous presse ESKA ;

- Os et contraception hormonale : que retenir – C. D’Arcangues, Département Santé et Recherche Génésiques, OMS, Genève - RÉALITÉS en Gynécologie Obstétrique janvier/février 2009 n° 135.

Dr LYDIA MARIE-SCEMAMA
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Source : lequotidiendumedecin.fr