Coordonnateur du rapport de recommandations sur les hépatites B et C, remis en mai 2014 au ministère de la Santé, et actuel président du Comité de suivi des recommandations, le Pr Daniel Dhumeaux (CHU Henri Mondor, Créteil) confirme l’importance de ces avancées et la nécessité de trouver les solutions rapides (le prix actuel des médicaments est une réelle préoccupation) pour une diffusion large de ces traitements.
Les combinaisons de ces nouvelles molécules à activité virale directe (sans interféron) permettent d’obtenir des taux très élevés de guérison (aujourd’hui supérieurs à 90 %) avec des durées de traitement très courtes (3 mois). « C’est la première fois que nous sommes capables de guérir une maladie infectieuse chronique et dans un délai aussi court et avec très peu effets indésirables. Fort logiquement, nous souhaitons proposer ces traitements très efficaces aux 170 000 personnes qui, selon les estimations, restent aujourd’hui infectées en France par le VHC », souligne le Pr Dhumeaux.
Principe de réalité
Cet objectif, pour être atteint, doit passer par des progrès au niveau du dépistage. On estime en effet que parmi ces 170 000 personnes, un tiers environ ignore son infection. « Notre objectif est ensuite de traiter l’ensemble des patients, dans un but de réduction de la pression épidémique et, à terme, de contrôle de l’épidémie. Mais dans l’immédiat, il convient de tenir compte de la réalité économique. Le coût élevé des traitements ne permet pas, aujourd’hui, leur diffusion immédiate et généralisée », souligne le Pr Dhumeaux.
Face à cette réalité, le rapport de recommandations préconise de privilégier le traitement chez les patients « ayant le risque plus élevé de progression de leur infection ». Selon le rapport, doivent être aujourd’hui traités en priorité les patients ayant au moins une fibrose significative (stade de fibrose supérieur ou égal à F2 généralement évalué maintenant par des tests non invasifs). Et « quel que soit le stade de fibrose, les patients ayant des manifestations extra-hépatiques ou en attente de transplantation, les femmes ayant un désir de grossesse et, avec l’objectif de réduction des risques de contamination, les usagers de drogues et les personnes détenues ».
Le suivi ne s’interrompt pas
Au décours de leur traitement (ambulatoire dans la quasi-totalité des cas), ces patients, même guéris de leur virus, devront pour la plupart continuer d’être suivis. « Cette surveillance est indispensable. Un patient cirrhotique, même si le virus a disparu, gardera souvent ses lésions de cirrhose. Il est donc impératif de surveiller le risque de cancer du foie. Les risques d’apparition, après la guérison, de comorbidités (type prise de poids ou consommation excessive d’alcool) sont également à prendre en compte », indique le Pr Dhumeaux.
Selon lui, il est encore un peu tôt pour voir l’effet de ces nouvelles molécules sur la baisse du nombre de cirrhoses ou de cancers du foie. « Elle est toutefois hautement prévisible, car déjà observée avec les traitements antérieurs, moins efficaces. Et d’ores et déjà des retraits de liste de transplantation hépatique ont été observés. Pour des raisons logistiques, mais surtout de maîtrise des coûts, la montée en charge des traitements se fait de façon progressive. On a traité 14 000 patients en 2014. On devrait en traiter 20 000 en 2015. Et, avec l’aide des pouvoirs publics et des industriels (les coûts des médicaments devront être singulièrement réduits), nous sommes déterminés à poursuivre cette dynamique. Impliquant l’ensemble des professionnels, notamment du secteur libéral, la stratégie devra être étalée dans le temps. Elle visera à effectivement traiter l’ensemble des personnes atteintes, prévenir individuellement les risques de complications (on insiste de plus en plus aujourd’hui sur les désordres extra-hépatiques, notamment cardiovasculaires, induits par l’infection) et au bout du compte assurer collectivement le contrôle l’épidémie. »
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