La Pr Corinne Isnard-Bagnis prend en charge des patients atteints de maladies chroniques (insuffisance rénale, greffes, dialyse…), métaboliques, ayant des problématiques liées au surpoids et à l’obésité. Cette néphrologue exerçant à l’hôpital Pitié-Salpêtrière a découvert la méditation de pleine conscience il y a 10 ans, aux États-Unis auprès de Jon Kabat-Zinn, professeur de biologie à Boston : « La formation à la méditation de pleine conscience que j’ai suivie aux États-Unis m’a permis d’intégrer cette pratique, depuis 2012, dans les programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP) que nous proposons à l’hôpital. J’organise ainsi pour les patients, plusieurs fois par an, un stage de huit semaines d’apprentissage de la “réduction du stress basée sur la pleine conscience”, ou MBSR, pour mindfulness-based stress reduction. Chacun de nos stages fait l’objet d’évaluations par nos équipes. » Il s’agit notamment d’aider les patients à prendre conscience des situations de leur vie quotidienne qui les amènent à ressentir de l’anxiété et à souffrir de ruminations mentales les empêchant de mener à bien leurs activités.
Se réconcilier avec son corps
La pratique régulière de la méditation de pleine conscience vise à mieux appréhender le moment présent pour éviter l’anticipation anxieuse et les ruminations liées aux événements difficiles du passé. « Chez les patients atteints de maladies chroniques, l’anxiété liée à l’avenir et les pensées négatives sont décuplées et réactivées par toutes les situations potentiellement menaçantes qu’ils vivent régulièrement, telles que l’attente des résultats d’une analyse sanguine, d’un scanner, d’une IRM pouvant révéler une évolution de leur maladie. Ainsi, de 30 à 40 % de nos patients dialysés sont dépressifs et éprouvent des difficultés à gérer leur stress. Les patients chroniques sont souvent dans le déni de leur corps, source de souffrance. La méditation de pleine conscience les aide notamment à réexplorer leurs sensations corporelles, à ne pas se focaliser uniquement sur la douleur, mais à être capable de porter l’attention vers les zones du corps non douloureuses, voire agréables », explique celle qui est aussi coresponsable du DU « Méditation, gestion du stress et relation de soin » de la faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie (Paris). Si la méditation de pleine conscience se prête peu aux études cliniques quantitatives d’une médecine fondée sur les preuves, elle bénéficie, néanmoins, d’études sérieuses fondées sur des méthodologies qualitatives. Aujourd’hui, l’efficacité de l’aide fournie par la pratique régulière de la méditation de pleine conscience, pour mieux gérer la douleur, diminuer l’anxiété et le risque de survenue d’une dépression, bénéficie d’un niveau de preuve clinique intéressant.
Mieux gérer les troubles du comportement alimentaire
Pour accompagner ses patients atteints de maladies métaboliques, la Pr Isnard-Bagnis a également suivi une formation axée sur les liens entre méditation de pleine conscience et alimentation auprès de la pédiatre américaine Jan Chozen Bays. « L’alimentation sert à nourrir le corps, mais aussi l’âme et les émotions. Nous mangeons parfois parce que nous sommes tristes ou angoissés », affirme-t-elle. Nous avons différentes formes de faim : celle des yeux (nous voulons manger une jolie pâtisserie en vitrine d’une boulangerie), celle de l’odorat (les effluves d’un plat mijoté nous ouvrent l’appétit), celle du goût, celle de l’estomac qui gargouille, ou encore celle du cœur (nous optons pour une sucrerie après un stress important). « La méditation de pleine conscience, poursuit la néphrologue, aide les patients souffrant d’obésité ou de troubles du comportement alimentaire à reconnaître le type de faim auquel ils font face et à se demander avant de manger tel ou tel aliment s’ils ont vraiment besoin de le consommer. Ils s’affranchissent ainsi du mode “pilote automatique” et gèrent mieux leur alimentation en se concentrant, avec plus de réalisme, sur les signaux de faim que leur envoie leur corps. » La méditation de pleine conscience apprend également aux patients à porter un regard bienveillant sur eux-mêmes. « Les soignants jouent aussi un rôle clé en valorisant chaque effort, même minime, fourni par les patients chroniques en faveur de leur santé », conclut la Pr Isnard-Bagnis.
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