Réduire le recours aux antibiotiques, avec idéalement zéro antibiothérapie inutile, et dans la mesure du possible leur durée de prescription est une nécessité pour faire face à la menace des bactéries multirésistantes, mais aussi pour réduire leur impact délétère sur le microbiote, sur les troubles digestifs et pour améliorer l’observance, qui diminue avec la durée du traitement.
L’association entre la durée de l’antibiothérapie et la survenue de résistances est démontrée dans de nombreuses études cliniques. Une revue systématique de 24 études retrouve ainsi un risque de résistance multiplié par un facteur 2,5 dans les 2 mois suivant une antibiothérapie pour infection urinaire et par un facteur 2,4 dans les 2 mois suivant une infection respiratoire. Ce risque de résistance persiste à long terme, avec des odd ratio poolés à 12 mois respectivement de 1,33 et 2,4. Il a ainsi été montré que dans certaines indications, une forte dose d’amoxicilline pendant 5 jours est préférable à une dose standard pendant 10 jours.
« L’objectif de l’antibiothérapie est l’éradication bactérienne, mais la vitesse de diminution de l’inoculum, et donc la durée de l’antibiothérapie, dépend du type d’infection (existence ou non de matériel, biofilm), de la bactérie (croissance rapide ou lente), des caractéristiques de l’antibiotique (bactéricidie) et de l’hôte et son système immunitaire », a expliqué la Dr Élise Launay.
Les interactions hôte/bactérie ont été modélisées selon 4 types, validés dans des études cliniques : non régulé (portage commensal), régulé, comme c’est par exemple le cas dans la primo-infection tuberculeuse, opportuniste, comme dans la pneumonie à pneumocoque après portage sain et enfin autolimité, ce qui est le cas dans certaines otites moyennes aiguës. Selon le modèle, le traitement pourra être à forte concentration et prolongé, comme dans la tuberculose, ou plus court.
« Dans les infections courantes, il y a peu de certitudes en termes de durée de traitement, a souligné le Pr Robert Cohen. Et les recommandations préconisent des durées variables dans un rapport de 1 à 2 ». En pratique, plus que la gravité de la maladie, c’est le risque de récidive précoce après traitement qui constitue un des paramètres majeurs à considérer pour établir la durée du traitement. Pour les otites et les sinusites, ce risque est élevé du fait du dysfonctionnement des trompes d’Eustache ou des ostiums et de l’importance du biofilm dans ces pathologies. Et si les bactéries sont éradiquées de l’oreille moyenne en moins de 5 jours dans plus de 90 % des cas lorsque la souche est sensible, ce n’est pas le cas dans la flore rhinopharyngée où S. pneumoniae et H. influenzae persistent dans plus de la moitié des cas. À l’inverse, dans les pneumonies, ce risque de récidive est faible.
Ces données ont été prises en compte dans les propositions publiées récemment par la SPILF. Ainsi, si l’on prend l’exemple de l’amoxicilline, le traitement doit être de 10 jours dans les otites moyennes aiguës chez les nourrissons de moins de 2 ans et/ou chez les récidivistes et/ou en cas d’otorrhée. Dans les sinusites une durée identique est préconisée, alors que dans les pneumonies, un traitement de 5 jours est recommandé.
D’après les communications des Pr et Dr Elise Launay (Nantes) et Robert Cohen (Créteil).
(1) Revue des maladies infectieuses. Doi : 10.1016/j.medmal.2017.01.007
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