Asthme infantile

Un déficit de prise en charge

Publié le 10/06/2011
Article réservé aux abonnés
1307668485261372_IMG_62587_HR.jpg

1307668485261372_IMG_62587_HR.jpg

L’ASTHME, dont la prévalence est stabilisée depuis quelques années autour de 10 %, est la maladie chronique la plus fréquente en pédiatrie. Pourtant, il reste sous diagnostiqué et sous traité, ce qui conduit à une morbidité non négligeable : seuls 6 % des enfants sont très bien contrôlés et 94 % sont à haut risque d’exacerbations, parfois graves. Ce sont les enfants de moins de 5 ans qui paient le plus lourd tribut aux hospitalisations pour exacerbation : 100 décès par an en France. En France, une mortalité incompressible de 100 décès annuels est observée.

Le diagnostic d’asthme est difficile, en particulier chez les moins de 5 ans où il ne peut être conforté par des épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) et se fonde donc exclusivement sur des arguments cliniques, peu spécifiques.

Chez l’enfant de moins de 36 mois, l’asthme est défini par la Haute autorité de santé (HAS) comme la répétition, au moins trois fois depuis la naissance - quel que soit l’âge de début, le facteur déclenchant, en présence ou non d’une allergie - d’épisodes de dyspnées avec râles sibilants. Ces derniers peuvent être à prédominance nocturne, ou être augmentés par le rire ou les pleurs. Les épisodes de dyspnée sont souvent viro-induits.

Chez les nourrissons, les formes cliniques sont très variées et l’asthme peut prendre la forme d’une toux chronique, associée ou non à des sibilants, ou d’une toux grasse chronique. Il existe divers phénotypes de ces asthmes du nourrisson, qui évoluent différemment avec le temps. Chez le siffleur transitoire précoce, les symptômes apparaissent avant l’âge de 3 ans et sont fortement liés au tabagisme maternel ; chez le siffleur persistant, les symptômes sont associés à l’atopie ; d’autres peuvent être siffleurs tardifs. Une distinction est également faite entre le siffleur épisodique -présentant des sifflements viro-induits avec une intercrise négative - et le siffleur permanent, pour qui des symptômes intercurrents persistent.

En pratique, l’interrogatoire sera extrêmement minutieux, à la recherche d’indices, tels qu’une « bronchite sifflante » ou « bronchite dentaire » survenues antérieurement. L’enquête environnementale est essentielle. Elle recherchera des irritants ou des pneumallergènes : tabac, humidité, animaux domestiques, cafards, plantes, moquette, rideaux... L’examen physique recense des signes d’atopie : xérose cutanée, signe de Dennie-Morgan (double-pli de la paupière inférieure). Cet examen est le plus souvent normal. La présence d’une altération de la croissance staturo-pondérale, d’anomalies auscultatoires, d’un hippocratisme digital ou d’un élargissement antéro-postérieur du thorax doit faire évoquer un autre diagnostic.

Le seul examen complémentaire à réaliser est une radiographie du thorax de face, idéalement en inspiration et en expiration forcées. Elle permet d’éliminer des diagnostics différentiels tels qu’une inhalation de corps étranger, une anomalie des arcs aortiques ou une malformation broncho-pulmonaire.

Un diagnostic confirmé en thérapeutique.

C’est l’efficacité du traitement d’épreuve qui confirme le diagnostic d’asthme. Ainsi, dans les asthmes persistants, le succès des corticoïdes inhalés pendant au moins trois mois, avec réévaluation à six semaines, permet souvent de l’assurer. Par ailleurs, au cours d’une exacerbation, il y a une réversibilité, au moins partielle, des symptômes, avec les bêta-2 mimétiques, à condition qu’ils soient administrés de manière correcte en termes de dose et de technique.

Chez l’enfant plus grand, au-delà de 5 ans, les épreuves fonctionnelles respiratoires signent le diagnostic en mettant en évidence un syndrome ventilatoire obstructif, réversible après inhalation de bronchodilatateurs. Parfois, en cas de doute, un test à la métacholine est réalisé. Sa positivité témoigne d’une hyperréactivité bronchique.

Le traitement de l’asthme a pour objectif le contrôle de la maladie, qui est associé à une amélioration de la qualité de vie, une réduction des exacerbations et du recours aux soins. L’objectif du contrôle total de l’asthme est accessible à une majorité d’enfants, au prix d’un traitement léger à modéré. Des efforts restent à faire puisque, selon une enquête menée en France en 2005 sur plus de 3400 enfants, seul un quart avait un contrôle optimal et près d’un tiers un contrôle inacceptable.

L’évaluation du contrôle se fonde sur la clinique et les EFR. Là encore, l’interrogatoire doit être minutieux. Il précise notamment les symptômes diurnes et nocturnes (toux, gêne, réveils…), l’existence ou non d’une limitation des activités, le recours aux bêta-2 ou corticoïdes de secours. Les EFR sont indispensables et doivent être réalisées au moins tous les 12 à 18 mois dans les asthmes légers, à intervalles plus rapprochés dans les asthmes plus sévères. En outre, la mesure du monoxyde d’azote (NO) bronchique - il est corrélé à la présence d’une inflammation éosinophilique des voies aériennes - est un test non invasif validé chez l’enfant, dont la réalisation ne se fait pas encore en routine. Il pourrait avoir une place intéressante dans la prise en charge des asthmes difficiles à contrôler.

Session « Asthme : les bonnes questions à poser ». D’après les communications des Drs Marion David, Marseille et Caroline Thumerelle, Lille.

> Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du Médecin: 8980