Traitement étiologique de l’HTAP : un espoir pour les malades les plus sévères

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Publié le 19/04/2024
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La confirmation des résultats positifs du sotatercept dans l’essai de phase 3 Stellar ouvre la voie à un traitement innovant dans l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), capable de bloquer la voie de signalisation pro-proliférative TGF-β, avec potentiellement un effet anti-remodelant.

Quelques milliers de malades pourraient être concernés en France

Quelques milliers de malades pourraient être concernés en France
Crédit photo : SCIENCE SOURCE/PHANIE

L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est une maladie pulmonaire rare caractérisée par un essoufflement progressif à l’effort, puis au repos, des malaises, des syncopes et le décès. Les traitements actuellement disponibles – essentiellement des vasodilatateurs – ne permettent pas la guérison.

Le centre de référence de l’hypertension pulmonaire (hôpital Bicêtre, AP-HP) et l’unité mixte de recherche 999 (université Paris-Saclay/Inserm) ont joué un rôle majeur dans les différentes étapes du développement du sotatercept (Acceleron, MSD), une biothérapie qui cible le processus pathogène, la prolifération vasculaire pulmonaire, en bloquant la signalisation de l’activine (via son récepteur de type IIA) dans la voie pro-proliférative TGF-β, avec donc probablement un effet anti-remodelant.

Flécher les patients

« Pour tous ces patients, l’adressage à un centre de référence ou de compétence du réseau PulmoTension (filière des maladies respiratoires rares RespiFIL et réseau européen ERN-Lung) est essentiel, d’autant qu’ils peuvent y bénéficier de la recherche, comme à Paris-Saclay ; ils sont associés de près à toutes les étapes de développement », insiste le Pr Humbert. 29 centres ont été labellisés fin décembre sur tout le territoire, y compris ultramarin.D

Un essai sur trois semaines

Après l’essai de phase 2 Plusar, les résultats de l’essai de phase 3 Stellar viennent d’être présentés (1). 323 adultes recevant un traitement de fond stable ont été randomisés pour recevoir toutes les trois semaines soit du sotatercept, à la dose initiale de 0,3 mg/kg de poids corporel par voie sous-cutanée, avec une dose cible de 0,7 mg/kg, soit un placebo. Le critère d’évaluation principal était le changement du test de marche de six minutes à la semaine 24.

Résultat, cette variation médiane par rapport à la valeur initiale était de 34,4 mètres dans le groupe sotatercept et de 1 mètre dans le groupe placebo.

Neuf critères d’évaluation secondaires ont été testés hiérarchiquement. Les huit premiers ont été significativement améliorés avec le sotatercept, par rapport au placebo.

Les effets indésirables, survenus plus fréquemment avec le sotatercept qu’avec le placebo, comprenaient les saignements (avant tout des épistaxis et, moins fréquemment, des saignements digestifs ou d’autres localisations), les vertiges, les télangiectasies, l’augmentation du taux d’hémoglobine, la thrombocytopénie et l’augmentation de la pression artérielle.

Une option pour les patients sévères

Le sotatercept vient de recevoir son AMM aux États-Unis. Pour les recommandations européennes (2), lorsque l’évaluation des caractéristiques cliniques et fonctionnelles d’un patient récemment diagnostiqué indique qu’il est à haut risque de décès (> 20 % à un an), une association de trois médicaments est préconisée : prostacycline parentérale SC ou IV, antagoniste des récepteurs de l’endothéline (ARE) VO et inhibiteur de phosphodiestérase type 5 (IPDE5) VO. L’objectif thérapeutique est alors d’être requalifié en faible risque (mortalité < 5 % à un an), lors d’une évaluation effectuée au bout de trois à six mois.

Si le risque initial est faible (< 5 %) ou intermédiaire (de 5 à 20 %), c’est une association orale de deux traitements vasodilatateurs (ARE + IPDE5) qui est retenue, avec pour objectif de maintenir ou d’atteindre le faible risque en 3 à 6 mois.

« Malheureusement, en pratique, la majorité des malades n’atteignent pas ces objectifs ambitieux », déplore le Pr Marc Humbert, service de pneumologie et soins intensifs respiratoires de l’hôpital Bicêtre (AP-HP) et centre de référence de l’hypertension pulmonaire.

La majorité des malades n’atteignent pas les objectifs thérapeutiques avec les traitements actuels

« Pour ceux qui sont à risque élevé, il faut alors envisager la transplantation pulmonaire ou les traitements injectables s’ils n’étaient pas déjà initiés et, pour ceux à risque intermédiaire, une intensification thérapeutique : administration d’un troisième médicament et/ou une innovation thérapeutique. C’est là que pourrait se positionner le sotatercept. Il s’agirait ainsi d’un traitement additionnel de deuxième ligne chez des patients qui ne sont pas à l’objectif thérapeutique. Quelques milliers de malades déjà suivis dans des centres HTAP pourraient ainsi être concernés en France », explique le Pr Humbert.

Le sotatercept est également testé dans des formes graves, comme traitement additionnel.

Une famille qui va s’étoffer

D’autres médicaments de la même classe sont en développement, avec l’espoir qu’ils aient une valeur ajoutée. Des laboratoires travaillent aussi sur d’autres membres de la voie de signalisation du facteur de transformation de croissance bêta (TGF-β). Un essai en cours porte ainsi sur le KER-012 (Keros therapeutics), une biothérapie visant les ligands du récepteur IIB de l’activine, qui agit dans cette voie.

(1) Hoeper MM et al. N Engl J Med. 2023 Apr 20;388(16):1478-90

(2) M. Humbert et al. Eur Respir J. 2023 Jan 6;61(1):2200879

Dr Nathalie Szapiro

Source : Le Quotidien du Médecin