Soixante-dix produits pharmaceutiques à base de nanotechnologies sont actuellement en cours d’essai clinique. 77 sont déjà sur le marché. Ces chiffres, donnés par la European technology platform nanomedicine (ETPN, une initiative conjointe de l’industrie et de la Commission européenne), le prouvent : en dépit de leur petite taille, les nanoparticules commencent à prendre beaucoup de place en médecine.
« C’est vraiment un domaine sur lequel l’Europe est bien placée, nous nous battons à armes égales avec le reste du monde », se réjouit Laurent Levy, PDG de Nanobiotix. Cette entreprise française développe des nanoparticules qui, activées par la radiothérapie, maximisent l’action des rayons à l’intérieur des cellules cancéreuses. Résultat : des traitements plus ciblés, car pour la même dose de rayons, l’effet est démultiplié à l’intérieur de la tumeur. Laurent Levy précise que les essais cliniques sont dans leur « toute dernière phase », et prévoit une Autorisation de mise sur le marché (AMM) « avant la fin de l’année ».
L’oncologie et au-delà
« La majorité des développements de la nanomédecine se situent actuellement dans le champ de l’oncologie », remarque Émilie Roger, enseignante en pharmacie à l’université d’Angers et coresponsable du master « NanoPharma » de cette même université. Mais on peut également citer des avancées du côté des maladies infectieuses (le rôle des nanos est par exemple étudié dans le cadre de la résistance aux antibiotiques), ou encore de l’imagerie (des nanoparticules d’oxyde de fer peuvent augmenter le contraste en IRM).
Et pourtant, des efforts restent à fournir pour familiariser le corps médical avec ces innovations. « Les nanotechnologies ne sont pas forcément bien connues des médecins, si l’on excepte ceux qui sont immergés dans le domaine de la recherche », regrette le Pr Marie-Claire Venier, consoeur d’Émilie Roger et co-responsable du master d’Angers. L’universitaire relève d’ailleurs que depuis la création de cette formation, elle a été suivie par un seul médecin.
Master européen et grandes attentes
Voilà qui n’empêche pas le champ académique de se structurer autour de la question, avec notamment la création en 2014 de la Société française de nanomédecine. « Nous faisons un gros travail pour que la nanomédecine soit mieux connue », explique sa présidente, le Dr Nathalie Mignet, qui dit écumer les congrès spécialisés à ces fins. Côté enseignement, les choses bougent également avec la création cette année d’un master européen baptisé « Nanomed » sur le sujet. « L’idée est de fédérer les différents acteurs français et européens », explique Émilie Roger, dont le master d’Angers (créé en 2012) est intégré à cette initiative européenne.
Une telle structuration est bienvenue, car les différents acteurs des nanos ont de grandes attentes. Chacun a son (petit) rêve en la matière. Nathalie Mignet parle par exemple de systèmes d’imagerie qui permettraient de contrôler visuellement ce qui se passe à l’échelle nanométrique. « Ce serait formidable, car dans un monde nano, on ne voit jamais rien », s’exclame-t-elle. Quant aux pharmaciennes Marie-Claire Venier et Émilie Roger, elles ne rêvent pas de « la nano la plus complexe et la plus originale », mais « la plus efficace qui pourra passer avec succès toutes les étapes du développement pharmaceutique ». Et dans le monde nano comme dans le monde macro, il est toujours plus compliqué de faire simple.
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