Les bénéfices des statines ont été sous-estimés et les effets secondaires « exagérés », dénonce le « Lancet ». Dans une large revue scientifique internationale, la balance bénéfices/risques apparaît clairement favorable. Ces résultats rassurants seront-ils suffisants pour calmer la polémique qui court ces dernières années en France et ailleurs ?
C'est en tout cas l'objectif affiché par les auteurs, qui veulent dénoncer « les allégations trompeuses concernant la sécurité et l'efficacité de traitements par statines » et « d'aider les médecins, les patients et le grand public à prendre des décisions éclairées à propos de la prescription des statines pour la prévention des infarctus et des accidents vasculaires cérébraux (AVC) ».
Une évaluation définitive
Ces antilipémiants ont été décriés, notamment en France avec la publication en 2013 du livre du Pr Philippe Even. De nombreux patients ont arrêté leur traitement suite à la polémique autour des statines ces dernières années, – près de 200 000 au Royaume-Uni et 10 % d'arrêt en plus à chaque publication négative au Danemark.
L'équipe du Dr Rory Collins à l'université d'Oxford entend même mettre un coup d'arrêt à cette dangereuse controverse, estimant que la solidité des données disponibles leur permet de donner un verdict définitif. « Aucun résultat supplémentaire qui émergerait à propos des effets des statines ne pourra modifier sensiblement la balance entre les bénéfices et les risques », écrivent-ils.
Traiter 10 000 patients pendant 5 ans
Dans leur analyse, les auteurs mettent en garde contre les risques à conclure hâtivement à partir d'études non randomisées observationnelles. Selon l'étude britannique, la réduction du taux de cholestérol LDL de 2 mmol/l par une statine (atorvastatine 40 mg) dans une population de 10 000 sujets pendant 5 ans permet d'éviter un accident cardio-vasculaire majeur chez 1 000 sujets ayant des antécédents cardio-vasculaires, traités en prévention secondaire (10 %) et chez 500 sujets à risque sans antécédent, c'est-à-dire traités en prévention primaire.
Du côté des effets secondaires, les auteurs font la différence entre les symptômes musculaires (faiblesse, douleurs) et la myopathie définie par l'association de myalgies et de taux élevés de CPK et qui peut évoluer vers une rhabdomyolyse en l'absence d'arrêt du traitement. Ils rappellent que les seuls effets secondaires graves attribués à un traitement par statines au long cours sont la myopathie, l'apparition d'un diabète de type 2 et probablement la survenue d'AVC hémorragique. Pour les symptômes musculaires estimés à 20 % dans les études observationnelles, ils seraient en grande partie injustement attribués au médicament.
Des questions en suspens en France
La question des statines mérite d'être clarifiée en France. Quand la polémique a éclaté, la HAS avait réagi en défendant « l'intérêt indiscutable des statines en prévention secondaire », l'agence s'était montrée plus évasive pour la prévention primaire, estimant qu'il existe « Un certain mésusage en France » et que ces molécules sont à réserver aux personnes à haut risque.
De nouvelles études défendent la place des statines en prévention primaire, comme la récente étude HOPE3 . Dans ces dernières recommandations pour les dyslipidémies publiées fin août dernier, la Société européenne de cardiologie (ESC) propose de traiter après calcul du niveau de risque cardio-vasculaire. Ces nouvelles données devraient entrer en ligne de compte dans la nouvelle fiche mémo de la HAS sur l'hypercholestérolémie primaire à paraître en fin d'année.
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