Le plan du gouvernement révise en profondeur l'organisation territoriale tant en ville qu'à l'hôpital pour créer « un collectif de soins » de proximité au service des patients à l'horizon 2022.
En médecine libérale, le message d'Emmanuel Macron est clair : « l'exercice isolé [qui concerne un médecin sur deux] doit disparaître en 2022 ». Les praticiens sont incités à s'engager quasi systématiquement dans un exercice collectif, au sein d'une maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), un centre de santé, une équipe de soins primaires ou une communauté professionnelle territoriale (CPTS).
Le plan déploie massivement les CPTS, créées en 2016 par la loi Touraine, avec un objectif de maillage complet des territoires « d'ici le 1er juillet 2021 », précise Emmanuel Macron. Cette organisation libérale de proximité (couvrant entre 20 000 et 100 000 habitants) se verra confier des missions prioritaires : garantie d'accès à un médecin traitant, consultation rapide des spécialistes mais aussi – surtout – prise en charge des soins non programmés avec la réponse aux urgences de ville non vitales jusqu'à 20 heures. « Et même jusqu'à 22 heures, ce serait formidable ! », a réclamé Emmanuel Macron. Une négo conventionnelle « CPTS » précisera le cadre de financement. Le plan table sur 200 CPTS dès 2019 et un millier en 2022. Les médecins qui s'y engagent bénéficieront prioritairement des soutiens financiers et des financements conventionnels.
4 000 assistants et du temps en plus
Autre mesure : un nouveau métier d'assistant médical (qui existe déjà dans plusieurs pays anglo-saxons) pour libérer du temps médical en épaulant les généralistes et spécialistes libéraux : accueil des patients, recueil des données, vérification de l'état vaccinal ou de dépistage, mise à jour des dossiers, gestion de l'aval de la consultation… À l'horizon 2022, au moins 4 000 postes d'assistants médicaux seront créés (avec un financement impulsé par l'État), soit 2 000 médecins équivalent temps plein. « On en créera autant qu'il en faudra », s'est enflammé Emmanuel Macron. Le coût estimé par assistant oscille entre 40 000 et 50 000 euros par an pour un gain de 15 % à 20 % de temps médical. Mais pour en bénéficier, les médecins devront remplir trois conditions : exercer en cabinet de groupe, être inscrits dans un exercice coordonné et apporter un bénéfice mesurable, notamment en augmentant le nombre de patients suivis.
En complément de cette structuration de la médecine de ville, la gradation des activités hospitalières sera plus lisible autour de trois catégories d'établissements : soins de proximité (médecine, gériatrie…), soins spécialisés (chirurgie, maternité…) et soins ultra-spécialisés ou plateaux techniques de pointe. Les CHU qui fêtent leurs 60 ans en décembre feront l'objet de mesures particulières annoncées en fin d'année.
La nouveauté du plan porte plutôt sur la labellisation d'ici à 2022 de 500 à 600 hôpitaux qui assureront « exclusivement » des missions de proximité : activités de médecine polyvalente, soins aux personnes âgées, soins de suite et de réadaptation, suivi des maladies chroniques les plus fréquentes ou mise à disposition de plateaux techniques ouverts à la ville (imagerie, biologie, et explorations), équipes mobiles de soins ou équipements de télémédecine. Ces hôpitaux de proximité seront dotés d'un « statut spécifique » déterminé par voie législative. Objectif : développer l'exercice mixte ville/hôpital, associer les médecins de ville aux équipes médicales, faire participer les représentants des CPTS à leur commission médicale d'établissement (CME) et à leur conseil de surveillance. Leur modèle de financement sera « adapté » à ces missions.
Des équipes mobiles gériatriques
Le plan consacre un volet spécifique à la réponse à l'urgence et aux consultations de soins non programmés. Outre les CPTS (mobilisées pour les urgences non vitales de jour), le gouvernement prévoit des équipes mobiles gériatriques et le développement des gestionnaires de lit pour élargir la recherche de lits d'aval. Nouveauté : un forfait de coordination sera versé aux services d'urgence pour réorienter les patients vers la médecine de ville, une maison médicale de garde ou une consultation hospitalière.
En pratique, dans chaque territoire, cette réorganisation collective devra s'inscrire dans un projet de santé, formalisé par contrat. Les agences régionales de santé et l'assurance-maladie « pourront conditionner l'attribution de financements et d'autorisation d'activités de soins à l'effectivité des projets », prévient le ministère. Le pari de l'exécutif est que le levier incitatif soit suffisamment puissant pour éviter des mesures contraignantes.
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