Avec le Dr Nicolas Dantchev, chef du service de psychiatrie et le Dr Delphine Cantin, chef du service des urgences, « le Quotidien » retrace les deux jours et deux nuits vécus par les équipes de l’Hôtel-Dieu, l’établissement dédié par l’AP-HP (Assistance publique-hôpitaux de Paris) à la prise en charge psychologique et psychiatrique des victimes des attentats.
- Vendredi 23 h : Le SAMU lance l’alerte.
- 23 h 45 : Le dispositif de l’Hôtel-Dieu est opérationnel. 40 psychiatres et psychologues ont rejoint le site, 15 viennent de l’AP-HP, 5 des CUMP 92 (cellules médico-psychologiques des Hauts-de-Seine), 4 des CUMP 75, 6 des cellules psychologiques de la BSPP (Brigade des sapeurs-pompiers de Paris). Les UHCD (unités d’hospitalisation de courte durée) sont transformées en salles de réunion et les boxes sont aménagés pour permettre l’accueil de 200 patients en circuits dédiés, avec des personnels de renfort de la Protection Civile et de la Croix Rouge française.
- Nuit de vendredi à samedi, entre minuit et cinq heures : les personnes impliquées dans les attentats sont acheminées à l’Hôtel-Dieu, par groupes de quatre dans des véhicules de la BSPP. À la différence des précédents attentats, la plus part sont jeunes. En tout 50 patients sont pris en charge, avec des entretiens individuels. Des certificats initiaux d’ITT (interruption temporaire de travail) leur sont remis, avant même qu’ils aient engagé des procédures judiciaires (entre huit et quinze jours d’ITT, pour les personnes qui ont été en contact avec des cadavres). Les impliqués sont raccompagnés à leurs domiciles par des navettes de la Protection Civile, quelques-uns passent la nuit dans des chambres de l’Hôtel-Dieu.
- Samedi matin : une quarantaine de psychiatres et psychologues sont sur le pont, avec le renfort de la CUMP 95 (Val d’oise) ; des dizaines de personnes à la recherche de proches ou ayant appris leurs décès arrivent à l’Hôtel-Dieu pour des entretiens individuels.
- 14 h-16 h : une soixantaine de personnes impliquées arrivent sur le site et sont prises en charge. C’est le moment le plus tendu pour les équipes de l’Hôtel-Dieu. Des volontaires ont rejoint les PH en renfort et sont les bienvenus.
- Nuit de samedi à dimanche : le flux des consultations se ralentit.
- Dimanche : les nouveaux impliqués arrivent avec des formulaires de réquisition de soins pour la rédaction des certificats initiaux d’ITT.
- À partir de lundi matin : 48 heures après les événements, c’est la prise-en-charge « post-immédiat » qui commence et qui va encore mobiliser les équipes pour une période de deux à trois semaines.
« La difficulté va être de tenir dans la durée et nous accueillerons volontiers des médecins et des psychologues volontaires bénévoles, formés à la prise en charge des psycho-traumatismes », annonce le Dr Dantchev, en reconnaissant que les CUMP ont pu connaître des tensions dans le passé pour assurer ce suivi dit « post-immédiat ».
« Pour la prise en charge immédiate, en revanche, assure le chef de service, nous avons tiré avec profit les enseignements des alertes précédentes, en mobilisant des moyens en personnels et en locaux qui ont permis à toutes les personnes d’ être accueillies et de bénéficier de soins sans attendre. »
L’activation de centres d’accueil à la mairie du XIe arrondissement, ainsi qu’à l’Ecole Militaire (pour les familles) a certainement renforcé le dispositif et évité les phénomènes de burn-out qu’avait signalés au « Quotidien » le Pr Didier Cremniter, responsable de la CUMP 75, après les attentats de janvier. Les équipes avaient alors souffert des manques d’effectifs et de locaux.
Christian Delahaye
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