L'unité NutriOmique est née au début des années 2000. Plus d'une vingtaine de collaborateurs d'horizons divers (médecins, biologistes, généticiens, bio-informaticiens…) y unissent leurs compétences pour mieux comprendre les relations interorganes et la complexité des maladies métaboliques, et en particulier de l'obésité.
« Recevoir le prix Galien symbolise la reconnaissance du travail de toute une équipe, mais aussi la reconnaissance de l'obésité en tant que vraie pathologie, alors qu'elle a longtemps été considérée davantage comme un phénomène sociétal », indique au « Quotidien » la Pr Karine Clément, directrice de l'unité NutriOmique et nutritionniste à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Agoniste des récepteurs MC4R
L'unité NutriOmique s'est notamment intéressée aux formes rares de l'obésité. En cas de prise de poids, le tissu graisseux synthétise normalement de la leptine, qui va agir sur le cerveau afin de diminuer la prise alimentaire via la voie leptine/mélanocortine. La Pr Clément et son équipe ont identifié des mutations au niveau des gènes de cette voie à l'origine de certaines formes d'obésité très graves.
Cette approche génétique a permis de diagnostiquer ces formes qui se manifestent par une surcharge pondérale importante dès les premiers jours de vie. Elle a également conduit au développement d'un médicament efficace : aujourd'hui, ces formes peuvent être traitées par setmélanotide, un agoniste des récepteurs MC4R. « Ce médicament court-circuite la voie leptine/mélanocortine et stimule les récepteurs MC4R, ce qui induit une diminution de la prise alimentaire », explique la Pr Clément. Le setmélanotide agit ainsi en aval de cette voie. Deux études de phase III (1,2) ont mis en évidence l'efficacité de ce traitement en termes de perte de poids.
Dialogue interorganes
L'approche pluridisciplinaire de l'unité NutriOmique a aussi permis de mieux appréhender les formes plus communes de l'obésité. « Nous avons identifié des cellules progénitrices qui contribuent à la formation de fibrose dans le tissu graisseux (3) et avons montré que cette fibrose freine la perte de poids », rapporte la Pr Clément.
Le dialogue entre les organes dans l'obésité impliquant aussi le microbiote est au cœur du travail de la chercheuse et de son équipe. « Nous avons mis en évidence une dysbiose, c'est-à-dire une altération de la diversité et des fonctions du microbiote chez des patients très obèses. Nous orientons nos travaux sur les relations entre les perturbations du microbiote et les perturbations d'organes. Le microbiote envoie notamment des signaux au cerveau, note la Pr Clément. L'obésité relève de la perturbation de systèmes complexes et ne se résume pas à une prise alimentaire trop importante ».
(1) Kühnen P et al., N EnglJ Med, doi: 10.1056/NEJMoa1512693, 2016
(2) Clément K et al., Nat Med, doi: 10.1038/s41591-018-0015-9, 2018
(3) Marcelin G et al., Cell Metab, doi: 10.1016/j.cmet.2017.01.010, 2017
Article suivant
E-santé et dispositif médical
L'équipe de l'unité NutriOmique recompensée pour ses travaux sur l'obésité
E-santé et dispositif médical
Biothérapie et thérapie génique
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024