La prévalence du diabète augmente avec l'âge : un quart des patients ont plus de 75 ans, soit un homme sur cinq et une femme sur sept entre 75 et 85 ans. Le diabète représente ainsi la sixième cause de mortalité. « Or, chez les patients diabétiques âgés de 75 à 84 ans, le diabète évolue depuis plus de 20 ans pour 40 % d'entre eux, d'où une forte augmentation du risque de complication et de mortalité », rappelle la Dr Anne-Sophie Boureau, médecine aiguë gériatrique (Nantes).
Avec l'avancée en âge (à plus de 85 ans), la découverte du diabète se fait plus souvent à l'occasion de la survenue d'une complication ou de symptômes atypiques comme une altération inexpliquée de l'état général, une déshydratation, une polyurie nocturne avec augmentation du risque de chute, l'installation d'une incontinence urinaire, des infections à répétition ou urinaires, des troubles du comportement, voire une décompensation hyperosmolaire en situation de maladie aiguë ou de stress (favorisée par la perte de la sensation de soif, la prise de diurétiques et/ou l'existence de troubles cognitifs). D'autres complications chroniques sont encore parfois en cause, comme une cardiopathie ischémique, une insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée, une rétinopathie, une néphropathie, une neuropathie diabétique, des complications macro ou microvasculaires, des hypoglycémies, des troubles neurocognitifs et une sarcopénie.
Des hypoglycémies sous-diagnostiquées
Les hypoglycémies, dont le seuil est défini par une glycémie capillaire inférieure à 0,6 g/l, doivent éveiller l’attention. Elles sont sévères si elles nécessitent l'intervention d'une tierce personne. Beaucoup sont sous-diagnostiquées chez le patient âgé, compte tenu d'une diminution des signes neurovégétatifs (pâleurs, sueurs) liés au vieillissement ou à la prise d'un traitement bêtabloquant.
L'étude française Gérodiab (1) a inclus près de 1 000 patients de plus de 70 ans, parmi lesquels 33 % avaient eu une hypoglycémie symptomatique dans les six mois avant l'inclusion et 64 % dans les cinq ans (outre l'âge, une meilleure connaissance des symptômes et des mesures plus assidues des glycémies capillaires pourraient expliquer ce pourcentage). Les hypoglycémies sévères étaient de l'ordre de 3 %.
« Chez des résidents d'Ehpad qui ont bénéficié de trois mesures de la glycémie capillaire par 24 heures (pas forcément au moment des symptômes), un épisode glycémique a été retrouvé dans 20 % des cas. C'est d'autant plus soucieux que l'hypoglycémie aggrave les maladies chroniques et s'associe à un risque accru de chutes, notamment les plus graves nécessitant une hospitalisation », a insisté la Dr Boureau. Ces hypoglycémies sont favorisées par un nombre important de facteurs de risque, tels que les comorbidités, les médicaments, les troubles cognitifs et les évènements aigus nécessitant d'augmenter ponctuellement l'antidiabétique (dont il faut penser à réduire la dose après l'épisode aigu).
Éviter de surtraiter les patients fragiles
Quand le diabète est suspecté, il doit être confirmé par deux glycémies associées à une HbA1c. Une évaluation globale du patient est donc nécessaire : aspects cognitifs, thymiques, sociaux, état nutritionnel, autonomie, recherche d'une sarcopénie, antécédents de chutes… Pour le patient fragile, l'objectif est une HbA1c en dessous de 8 %. Chez le patient dépendant (troubles cognitifs majeurs associés à une perte d'autonomie), il n'existe pas d'objectif précis car le plus important est d'éviter ces hypoglycémies. « Or, une revue de la littérature a montré que 16 à 74 % des patients (dont de nombreux en Ehpad) sont surtraités (HbA1c < 7 %) contre seulement 2 à 15 % de patients sous-traités (HbA1c > 8,5 %) », relève la Dr Boureau. Une baisse de prescription permettrait de remonter l'HbA1c et de diminuer le risque d'hypoglycémie, mais elle n'est pas assez souvent mise en œuvre. Même les mesures hygiénodiététiques tiennent désormais compte de l'avancée en âge. « Dans cette situation, le régime doit être plus axé sur la prévention de la fragilité que sur celle du syndrome métabolique », conclut la Dr Boureau.
(1) Doucet J et al.Haemoglobin A1c and 5-year all-cause mortality in French type 2 diabetic patients aged 70 years and older: The GERODIAB observational cohort. Diabetes Metab. 2018 Dec;44(6):465-472
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