Après la sidération liée à l'arrivée du virus et la force de la première vague, des protocoles, des essais randomisées et des stratégies thérapeutiques bien définies, ont pu voir le jour. « Par rapport aux débuts où les médecins n'avaient que le paracétamol et l'oxygène à proposer, de gros progrès ont été accomplis », rappelle le Pr Olivier Hanon, chef du service de gérontologie, de l'hôpital Broca, (Paris) et coprésident du congrès PAPA.
Deux traitements peu coûteux et accessibles
La dexaméthasone permet de diminuer de 17 % l'hospitalisation et la mortalité des patients atteints de Covid-19, mais attention, elle n'est utile que pour les patients sous oxygénothérapie. « Alors qu'au tout début de la pandémie, on pensait qu'il ne fallait surtout pas prescrire de corticoïdes, ce traitement améliore le pronostic des malades et évite la survenue de formes graves et mortelles. Dans une récente méta-analyse publiée dans le JAMA (1) qui compare l'intérêt de toutes les corticothérapies, la dexaméthasone s'avère être la plus intéressante, avec une réduction de la mortalité de 36 % chez des patients atteints de Covid sévères. Elle s'est ainsi révélée plus efficace que l'hydrocortisone ou la méthylprednisone », précise le Pr Hanon. Selon une nouvelle publication (2), les corticoïdes inhalés pourraient avoir leur place chez des patients non oxygénodépendants, mais l'étude versus placebo qui a porté seulement sur 139 patients ayant reçu du budésonide dès leurs premiers symptômes, demande à être confirmée par d'autres essais.
Les anticoagulants sont très intéressants car les accidents thrombotiques (notamment des embolies pulmonaires sévères) représentent l'une des complications majeures du Covid-19. « Sous anticoagulants, la mortalité est réduite de 50 % car on évite les embolies pulmonaires mortelles. S'est alors posée la question de savoir à quelle posologie donner des anticoagulants, mais aucune différence n’a été remarquée entre les doses curatives et préventives. Il est donc préconisé une injection d'anticoagulant en préventif, dès que le patient est hospitalisé ou immobilisé en Ehpad. Avec la dexaméthasone, c'est un traitement majeur », insiste le Pr Hanon.
Des thérapies novatrices utiles en seconde intention
Le tocilizumab s'oppose à l'orage cytokinétique inflammatoire. Dans l'étude Recovery (3), une sous-analyse chez 4 000 patients sévères (oxygénodépendant et gardant une CRP élevée) fait état d'une réduction de 15 % du risque de décès à 28 jours avec cette molécule anti-interleukine 6, par rapport aux soins habituels. « C'est un traitement à réserver en seconde intention, après la déxaméthasone, précise le Pr Hanon. Les recommandations actuelles sont de le proposer en l’absence d’amélioration clinique dans les 48-72 heures et en présence d’un état inflammatoire important (CRP > 75). Les patients âgés peuvent être éligibles à ce traitement. Dans la sous-analyse de l'étude Recovery, la moyenne d'âge était de 63 ans ».
Les anticorps monoclonaux antiprotéine Spike sont une autre option. Ils ne peuvent actuellement être proposés que dans le cadre d'une ATU de cohorte. Le bénéfice a été retrouvé en cas de bithérapie : etesevimab/bamlanivimab ou casirivimab/imdevimab. « Chez des patients n'ayant pas encore d'atteinte sévère, l'objectif est d'éviter une charge virale importante. On les traite donc dans un délai maximal de cinq jours après le début des symptômes. Pour être éligible, trois critères sont retenus : un déficit immunitaire, un haut risque de complication (en raison d'un diabète, d'une hypertension artérielle sévère ou d'une obésité), ou un âge supérieur à 80 ans. En sont exclus les patients déjà sous oxygène, ceux atteints d'une forme sévère ou du variant sud-africain (inefficace) ». Il y a par exemple, un réel intérêt dans les clusters, chez les patients allant encore bien mais à haut risque de complication. En effet, la réduction de la charge virale est importante, de l'ordre de 50 à 70 %, diminuant ainsi considérablement le risque de sévérité de la maladie. Le bénéfice clinique retrouvé est élevé : 87 % de réduction des hospitalisations. « Or, les patients âgés de 80 ans ou plus, atteints du Covid-19 et en réanimation, ont un risque de décès de 72 % dans les six mois », rappelle de son côté le Pr Jean-Jacques Mourad, chef du service de médecine interne de l'hôpital Saint Joseph (Paris).
Et de gros flops !
Aucun bénéfice n'a été trouvé avec le remdesivir, l'hydroxychloroquine, l'azithromycine, ou encore l'association de l’hydroxychloroquine à l’azithromycine. Cette dernière a même entraîné davantage d'effets secondaires : 27 % de troubles du rythme cardiaque en plus. Les antiparasitaires n'ont guère eu plus de succès : l'ivermectine ne fait pas mieux que le placebo. L’antirétroviral lopanavir/ritonavir n'a pas non plus apporté de bénéfice, tout comme le plasma convalescent de patients guéris du Covid-19. Des traitements très anciens ont aussi été testés comme la colchicine, mais sans amélioration de la mortalité. Les résultats n'ont pas été meilleurs avec la vitamine D, la nicotine ou le zinc. « Pour d'autres traitements, de nouvelles études seront nécessaires pour trancher : c'est par exemple le cas de l'interféron bêta », conclut le Pr Hanon.
(1) The WHO Rapid Evidence Appraisal for COVID-19 Therapies (REACT) Working Group, JAMA. 2020;324(13):1330-1341.
(2) Ramakrishnan S et al. Lancet Respir Med 2021. doi.org/10.1016/ S2213-2600(21)00160-0
(3) RECOVERY Collaborative Group. Lancet 2021; 397: 1637–45
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