Les liaisons incertaines du Covid et de la peau

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Publié le 22/01/2021
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Depuis mars 2020, plus de 1 500 publications ont rapporté des manifestations cutanées potentiellement liées au Covid. Covidskin, une étude menée par la SFD, montre la grande diversité de ces lésions et la difficulté de les rapporter avec certitude au Sars-Cov-2, en particulier pour ce qui concerne les lésions acrales.
Deux tiers des lésions attribuées au Covid seraient des engelures

Deux tiers des lésions attribuées au Covid seraient des engelures
Crédit photo : phanie

Pour Covidskin, la Société française de dermatologie avait demandé aux médecins de rapporter les cas de lésions cutanées chez les patients suspects ou confirmés de Covid (1). Le 11 juin 2020, 467 cas ont été colligés, dont 311 (65 %) de manifestations acrales − engelures, pseudo-engelures − dites « orteil Covid ». Parmi les 156 autres patients, étaient retrouvées majoritairement des éruptions maculopapuleuses (53 %), très diverses, avec 50 à 60 % d’éruptions morbilliformes, mais aussi des éruptions urticariennes (21 %), vésiculeuses (3 %), des livedos ou des nécroses (8 %). Ces résultats étaient similaires à ceux relevés dans une étude internationale, essentiellement américaine, et une étude espagnole.

Le Covid était confirmé chez 51 personnes, infirmé chez 44, et ni confirmé ni infirmé chez 61. Les présentations cliniques étaient similaires quel que soit le statut Covid mais, chez les personnes dont la PCR était positive, 49 % étaient hospitalisées.

L’âge moyen des lésions non acrales était de 42 ans, elles surviennent en moyenne 8 jours après le début de l’infection. Les engelures surviennent un peu plus tardivement, 10 jours après le début de la maladie, chez des sujets plus jeunes (âge médian de 26 ans), et essentiellement dans des infections à Sars-Cov-2 sans symptômes infectieux ou avec des signes peu sévères, et où la confirmation biologique du diagnostic de Covid est moins souvent obtenue.

« Certaines équipes ont émis l’hypothèse d’un gradient de sévérité du Covid en fonction des lésions cutanées, depuis les engelures accompagnant des formes peu ou pas symptomatiques, tandis que les lésions de type vasculaire type purpura et livedo se manifestent dans les formes plus sévères, voire dans les lésions ischémiques acrales, des infections graves avec anomalies de la coagulation et coagulopathies », observe la Dr Laurence Le Cleach, hôpital Henri Mondor, coordonnatrice de l’enquête Covidskin.

La fréquence réelle des manifestations cutanées est difficile à établir, dans la mesure où l’examen dermatologique n’a pas été systématique et que les lésions prises en compte sont très hétérogènes. Selon les différentes études, elles peuvent varier de 2 à 20 %. Une étude menée sur six séries situe leur prévalence à 1,7 % des patients Covid.

Mystérieuses engelures

« Il reste encore beaucoup de questions, et en particulier sur le lien entre le Covid et les engelures, qui n’a pas été démontré, pas plus que la présence du virus au niveau cutané (2) », s’interroge la dermatologue.

Pour expliquer le nombre d’engelures observées au cours de l’épidémie de Covid chez des patients jeunes, peu ou pas symptomatiques, et ayant pour la plupart des tests négatifs, il a été soulevé l’hypothèse que, le virus étant rapidement éliminé sur ces terrains, la charge virale serait très faible, avec une réponse immunitaire essentiellement humorale à IgA, et une forte sécrétion d’interféron. Selon une étude du CHU de Nice, cette « interféronopathie » pourrait provoquer une microvasculopathie qui rendrait compte de ces engelures.

(1) R. Guelimi. Manifestations cutanées au cours l’épidémie de Covid-19 : étude Covid-Skin de la Société française de dermatologie. JDP 2020, CO 111

(2) L. Le Cleach. La majorité des engelures observées durant l’épidémie de Covid-19 ne semblent pas dues à l’infection par le Sras-Cov-2. JDP 2020, CO 094

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin