Pourquoi mange-t-on bio ? D'après plusieurs enquêtes de consommateurs, c'est d'abord pour la santé (la sienne, mais aussi celle des agriculteurs et des populations qui voisinent les champs), puis pour l'environnement et enfin le goût. Si toutes ces motivations ont du sens, les choses ne sont jamais simples, et il convient de modérer un peu les discours acquis à la cause biologique sans mesure.
La santé ? Attention à ne pas entretenir de raccourcis chez les consommateurs : « bio » ne veut pas dire « bon pour la santé ». Des céréales de petit-déjeuner ou une pâte à tartiner restent des bombes glycémiques et le vin contient 13-14 % d'éthanol cancérigène, bio ou pas. Ce n'est pas pour rien que les études épidémiologiques peinent à démontrer la meilleure santé des consommateurs de produits bio, sans parler des biais dus au fait que sont aussi ceux qui ont généralement une meilleure hygiène de vie.
Des constats et arguments à double tranchant
Quant à la valeur nutritionnelle intrinsèque des produits bio, mesurable biochimiquement, les faibles différences relevées sont autant imputable aux variétés cultivées qu'au mode de culture en lui-même, et ne jouent en outre pas toujours en faveur du bio. Ainsi, si les fruits et légumes bio contiennent généralement plus d'antioxydants et moins de nitrates que leurs homologues conventionnels, les résultats sont moins enthousiasmants pour le lait, qui contient certes plus d'oméga-3 mais aussi plus de dioxines (du fait d'un accès plus important au plein air et donc un environnement potentiellement contaminé par la pollution environnante) ou encore les céréales, un peu plus riches en acides aminés essentiels mais aussi en mycotoxines (du fait des moindres traitements antifongiques).
Reste la question des (résidus de) pesticides, qui bien que sévèrement contrôlés dans notre alimentation, peuvent toujours faire craindre d’éventuels effets cocktails non encore bien compris. Là encore, les preuves manquent à l'échelle du consommateur, mais sont par contre convaincantes pour ce qui est des maladies professionnelles, et on peut raisonnablement affirmer que le moins les agriculteurs manipuleront de produits chimiques, le mieux ils se porteront !
Étudier et comparer sans a priori
L'environnement ? Si l'agriculteur bio sollicite en effet moins l'industrie chimique pour produire engrais et pesticides de synthèse, il a parfois la main lourde sur le labour (ennemi de la biodiversité des sols). En outre, les rendements étant de 20 à 30 % inférieurs à ceux du conventionnel, ne plus cultiver qu'en bio nécessiterait d'augmenter largement les surfaces cultivées… qui ne sont pas illimitées.
La recherche agronomique pourrait cependant permettre d'améliorer les choses, et il reste certainement pour l'agriculture bio une marge de progression qui n'existe plus pour le conventionnel, qui a atteint ses limites. Mais cela est aussi vrai pour les autres propositions (agriculture de conservation des sols, agriculture de précision, agriculture « écologiquement intensive », etc.), qu'il convient d'étudier/comparer conjointement, sans a priori.
La qualité enfin : outre le fait que le critère est à la fois flou et subjectif, il semble que d'autres facteurs entrent aussi en jeu : ainsi, un produit de saison en circuit court sera souvent plus qualitatif, bio ou pas. Rappelons à ce titre que l'agriculture bio répond à une obligation de moyens et non de résultats : aussi contre-intuitif (et difficile à admettre pour les « pro-bio ») que cela puisse paraître, un œuf issu d'un élevage industriel aura potentiellement la même valeur nutritive/gustative qu'un œuf bio ; c'est donc sur d'autres critères (comme le bien-être animal) que doivent reposer les motivations du consommateur !
Bref, l'important est de manger varié et équilibré, en privilégiant le végétal. Bio… ou pas !
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