Du point de vue du comportement alimentaire, les générations se suivent et ne se ressemblent pas ! Selon Pascale Hébel, qui a dirigé les études trisannuelles du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) sur les comportements et consommations alimentaires en France, en dix ans l’alimentation des enfants a clairement perdu en diversité.
Fer et calcium à la peine
Ils consomment notamment moins de viandes de boucherie, de produits laitiers et semblent bouder les légumes. Selon le Crédoc, en 2016, on n’a jamais eu aussi peu de grands consommateurs de fruits et légumes. La part de très petits consommateurs (moins de deux portions par jour) est passée, elle, de 32 % en 2010 à 45 % en 2016.
Concernant la consommation de produits carnés, la tendance est aussi à la baisse (- 19 % chez les 6-10 ans entre 2007 et 2016 alors que dans le même temps, les quiches et les pizzas grimpent en flèche (+38 %).
Or, les publications scientifiques sont nombreuses à souligner le caractère délétère d’une consommation insuffisante en produits carnés, principalement du fait d’un risque de déficience en fer. En Europe, 7 à 18 % des jeunes enfants après un an et 24 à 36 % des adolescents sont en carence martiale. Ce constat inquiétant avait motivé les recommandations de la Société française de pédiatrie (SFP) en 2017. Celles-ci préconisent une supplémentation en fer systématique pour tous les enfants en allaitement maternel exclusif ou mixte après l’âge de six mois. Dès l’arrêt du lait de croissance et jusqu’à 18 ans, la consommation d’un produit carné lors d’au moins deux repas quotidiens est nécessaire pour assurer les besoins en fer.
La consommation de lait a elle aussi diminué de 21 % en 13 ans, principalement à cause du recul du petit-déjeuner chez l’enfant et l’adolescent. De ce fait, alors que les apports en calcium des 0-3 ans restent satisfaisants, chez les plus grands le nombre d’enfants en dessous du besoin nutritionnel moyen en calcium est en augmentation et s’est même envolé, sur six ans, de 4 % à 20 % chez les 3-5 ans et de 20 % à 37 % chez les 6-8 ans. Les besoins nutritionnels moyens en calcium sont fixés à 385 mg/j pour les 1-3 ans, 539 mg/j pour les 4-6 ans et 693 mg/j pour les 7-9 ans.
Des apports croissants en sucre
De son côté, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses)s’inquiète de la consommation croissante de sucre sous toutes ses formes chez les plus de 4 ans. Selon l’agence, 75 % des 4-7 ans, 60 % des 8-12 ans et 25 % des 13-17 ans en consomment en excès (sucres totaux hors galactose et lactose). Ces apports excessifs sont “préoccupants”, estiment les experts, car c’est dans l’enfance et l’adolescence que s’acquièrent les bonnes ou mauvaises habitudes alimentaires, qui risquent d’être conservées à l’âge adulte, et de favoriser l’obésité et le diabète.
De nouveaux repères spécifiques aux enfants
Face à cette évolution, l’Anses a édicté fin juin, dans le cadre du Programme national nutrition santé (PNNS), de nouveaux repères alimentaires spécifiques aux enfants. Elle recommande notamment de limiter les pâtisseries-biscuits-gâteaux, trop fréquents en particulier au goûter mais aussi de limiter les boissons sucrées, jus de fruits compris. D’autant que ces aliments présentent un intérêt nutritionnel faible. Les experts conseillent de les substituer par des produits laitiers sans sucre ou d’autres aliments riches en calcium, ainsi que des fruits frais (non transformés) et à coque.
L’Anses attire également l’attention sur la nécessité de réduire les “sucres ajoutés” présents dans de nombreux produits transformés et souligne l’intérêt des préparations “faites maison” qui permettent de mieux prendre conscience des apports en sucres et de les contrôler.
Un pictogramme pour aider les parentsUn pictogramme va progressivement faire son apparition dans les rayons des supermarchés, attestant du respect de la norme Afnor NF V90-001. L’intention est de guider les parents vers des produits spécifiquement conçus en fonction de l’âge de l’enfant, tant du point de vue de la réglementation drastique qui s’impose aux aliments adaptés aux moins de trois ans que de celui de leur besoins nutritionnels spécifiques.
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