Dernier bilan du VIH/sida en France

Un patient sur 3 découvre sa séropositivité au stade sida

Publié le 01/12/2011
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Crédit photo : S TOUBON

LE BILAN 2009-2010 de l’épidémie de VIH/sida en France que publie le « BEH » (n° 43-44) conforte les recommandations du Plan national de lutte contre le VIH/sida et les IST 2010-2014. Lancé à la fin de l’année 2010, il prône la généralisation du dépistage, qui devrait être proposé systématiquement, notamment par les médecins généralistes, et sa répétition dans les populations exposées.

L’activité de dépistage, qui avait augmenté entre 2003 et 2005 pour atteindre un pic de 5,29 millions, s’est stabilisée depuis 2006 autour de 5 millions de sérologies par an, dont 8 % réalisés dans un centre de dépistage anonyme et gratuit (CDAG). Soit un taux de dépistage de 77 pour 1 000 habitants par an. Il est « regrettable que la pratique du dépistage reste faible », commente le Pr François Dabis dans un éditorial intitulé « Éliminer les nouvelles contaminations VIH en France d’ici 2017 ».

Il souhaite que la « révolution des pratiques des professionnels de santé et l’adhésion des populations qui devra l’accompagner soient rapides », car, affirme-t-il, « le dépistage volontaire généralisé est absolument coût-efficace ». Selon lui, « des objectifs quantifiés doivent être (...) urgemment fixés sur le nombre de tests réalisés qui devrait doubler puis tripler, sur la disparition planifiée des diagnostics très tardifs et leur remplacement par des diagnostics très précoces jusqu’à ce que ceux-ci deviennent la seule forme d’entrée dans les soins ».

Le constat avant la nouvelle stratégie de dépistage est clair : la situation épidémiologique de l’infection à VIH reste « peu satisfaisante ». En 2010, 6 300 personnes ont découvert leur séropositivité pour le VIH, un nombre stable depuis 2006 après la diminution observée de 2004 à 2007. Ces découvertes de séropositivité l’ont été surtout à l’hôpital, mais la part des diagnostics réalisés par les médecins de ville est en augmentation de 24 % en 2003 à 32 % en 2010. Parmi les personnes ayant découvert leur séropositivité en 2010, 57 % ont été contaminées par des rapports hétérosexuels (97 % des femmes et 38 % des hommes) et 40 % par rapports sexuels entre hommes, 1 % l’ayant été par usage de drogues injectables. Pour la deuxième année, le nombre de découvertes de séropositivité augmente chez les homosexuels.

Perception à modifier.

En dehors du nombre de découvertes de séropositivité, une autre donnée de ce bilan inquiète : parmi les personnes ayant découvert leur séropositivité en 2010, 30 % avaient un taux de CD4 à moins de 200/mm3 (stade sida) au moment du diagnostic, 20 % entre 200 et 349/mm3, 21 % entre 350 et 499/mm3 et 30 % à 500/mm3 et plus. « Ces proportions sont constantes entre 2008 et 2010 », soulignent Françoise Cazein et col., les auteurs du bilan. Si l’on tient compte des recommandations de prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH (rapport Yéni 2010), 70 % des personnes qui découvrent leur séropositivité sont diagnostiquées alors qu’elles auraient déjà pu bénéficier d’une proposition de traitement.

La part de ces découvertes de séropositivité à un stade avancé est plus importante chez les hétérosexuels, qu’ils soient nés en France ou à l’étranger (respectivement 39 % et 44 %), que chez les femmes hétérosexuelles nées en France ou à l’étranger (22 % et 31 %) et que chez les homosexuels (19 %). La pathologie inaugurale la plus fréquente est désormais la pneumocystose pulmonaire

« L’évolution favorable observée sur la période 2003-2007, avec augmentation de la part des découvertes de séropositivité les plus précoces et diminution des plus tardives, ne se poursuit pas », notent les auteurs. Ces résultats confortent l’intérêt de la généralisation du dépistage, disent-ils. La perte de chance (diagnostic et traitement) est « d’autant plus regrettable que, aujourd’hui, une personne dépistée tôt et traitée dès que possible selon les recommandations en vigueur a d’excellentes chances de vivre longtemps, sans jamais développer les complications du sida et avec (seulement) les comorbidités liées à l’âge », insiste le Pr Dabis. Le dépistage généralisé devrait permettre de faire diminuer ces diagnostics tardifs et surtout, à terme, celui des nouvelles contaminations VIH. « Mieux que le simple contrôle sans objectif précis et plus réaliste que l’éradication du VIH/sida, qui n’est pas aujourd’hui possible », selon le praticien, qui milite pour que la France s’engage « de toute urgence » vers « l’élimination des nouvelles contaminations VIH » ou du moins leur diminution de 80 à 90 % en cinq ans.

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9051