La tympanoplastie est essentiellement à visée auditive ou dans un but de « propreté », pour éviter la contamination de l’oreille moyenne via le conduit auditif externe (CAE), permettre les bains ou assécher une otorrhée pour faciliter l’appareillage auditif. Elle prévient aussi la survenue d’un cholestéatome en évitant la migration de cellules épidermiques dans l’oreille moyenne à partir des berges de la perforation (otite moyenne chronique grave liée qui va progressivement détruire les structures environnantes).
On parle de myringoplastie – ou tympanoplastie stade I – lorsque le geste ne concerne que le tympan.
Incontournable audiométrie
L’examen sous microscope ou endoscope met en évidence la perforation et suggère des facteurs de moins bonne réussite de la greffe : perforation de grande taille, de siège antérieur, inflammation de la caisse du tympan. L’état de l’oreille controlatérale et des voies aériennes supérieures (VAS) sont des éléments importants à prendre en compte. « On a l’impression d’enfoncer une porte ouverte mais il faut encore insister sur la nécessité de réaliser une audiométrie vocale et tonale, évaluant la conduction osseuse et aérienne avant et après la tympanoplastie, souligne le Pr Vincent Darrouzet (Bordeaux). Si sa réalisation est difficile, il faut adresser l’enfant à une équipe spécialisée en audiologie infantile ». Une perforation simple n’entraîne pas de baisse majeure de l’audition, sauf si elle atteint plus du quart de la surface du tympan (jusqu’à 40 dB de perte auditive de transmission). Au contraire, une perte de transmission importante face à une petite perforation doit faire suspecter une atteinte associée (de la chaîne ossiculaire ou de perception par exemple). L’imagerie n’a pas d’intérêt.
Savoir reporter l’intervention
Il ne faut pas se presser d’opérer une perforation de moins de 6 mois, voire un an si celle-ci tend à se refermer, la fermeture spontanée étant toujours possible. La tympanoplastie ne doit être envisagée que sur des oreilles asséchées depuis au moins trois mois – sauf quelques cas particuliers où l’otorrhée persiste malgré le traitement local et la prise en charge des facteurs favorisants. L’intervention sera reportée en cas d’otorrhée aiguë, d’inflammation des VAS ; en cas d’allergie saisonnière non contrôlée, la saison pollinique devra être évitée. Chez l’enfant, on préfère si possible attendre 6 ans, soit la fin de la maladie d’adaptation, après résolution des infections récidivantes des VAS.
Il y a une deuxième oreille !
Dans un contexte pédiatrique, l’atteinte est souvent bilatérale. Le principe global est qu’on opère toujours en premier la moins bonne oreille, dans la crainte de complications postopératoires, même si elles sont rares. S’il existe une otite séromuqueuse ou une rétraction tympanique au niveau de l’oreille controlatérale, il faut surseoir jusqu’à leur guérison. En cas de surdité, la plus grande prudence s’impose, à la fois pour poser l’indication opératoire et dans la technique utilisée. « On peut cependant procéder à des gestes bilatéraux sous certaines conditions. Ainsi, on pourra envisager une tympanoplastie classique d’un côté, et une myringoplastie transméatique (par la voie du CAE) de l’autre, sur une petite perforation », explique le Pr Emmanuel Lescanne (Tours).
Exit l’aponévrose temporale, vive le cartilage
La chirurgie miniinvasive avec la voie transméatale s’impose de plus en plus. Alors qu’elle a révolutionné la chirurgie otologique de l’adulte, l’endoscopie reste moins convaincante en pédiatrie. Le cartilage, prélevé au niveau du tragus ou de la conque est devenu le matériau de référence pour la greffe chez l’enfant, à la place du fascia temporal celui-ci, plus souple, exposant au risque de rétraction en cas de dysfonctionnement tubaire chronique.
Une chirurgie de plus en plus ambulatoire
« Les progrès en anesthésie pédiatrique – en particulier les anesthésies « on/off » ultracourtes – l’analgésie débutée en préopératoire, les antiémétiques alliés aux suites bien prévisibles de la myringoplastie autorisent la prise en charge ambulatoire de l’enfant sans majoration du risque », se félicite le Pr Thierry Mom (Clermont-Ferrand). Aux États-Unis, où on compte 50 000 myringoplasties en ambulatoire chez l’enfant, les motifs de conversion en hospitalisation conventionnelle sont rares (2,8 %). Une antibiothérapie prophylactique n’a pas sa place et les gouttes à potentiel ototoxique doivent être bannies tant qu’on n’est pas sûr que le tympan est refermé.
Des complications rares, un suivi prolongé
Le tympan et l’audition doivent être contrôlés 2 à 3 mois après l’intervention. On manque d’études spécifiques sur le devenir de ces tympanoplasties. À court terme, la perforation est refermée dans 75 % des cas, mais il faut attendre 6 mois pour parler de cicatrisation. À un an, il reste une perforation dans 19 à 25 % des cas. La plupart récupèrent l’audition dès le 2e mois, avec moins de 15 dB de perte de transmission résiduelle. La complication la plus redoutée est la labyrinthite, mais elle reste exceptionnelle après myringoplastie simple. Les parents doivent consulter immédiatement en cas d’otorrhée, saignement et a fortiori en cas de vertige, paralysie faciale, ou baisse brutale de l’audition.
La surveillance de ces enfants doit être prolongée, car on peut observer à long terme une reperforation, une rétraction tympanique voire un cholestéatome.
Session « Actualisation de la recommandation sur le traitement chirurgical des perforations tympaniques de l’enfant »
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