C’est après la cinquantaine que la consommation d’alcool hebdomadaire chez l’homme est la plus forte. Et que surviennent les conséquences sur la santé d’une alcoolisation parfois ancienne. D’où l’intérêt d’une prise en charge pour abaisser la dose ingérée.
« Dans nos services d'addictologie la moyenne d'âge des alcooliques se situe autour de 43-45 ans. On a, en effet, malheureusement, des jeunes de 20 ans déjà très dépendants. Néanmoins c'est typiquement vers 40-50 ans qu'on commence à payer le prix fort en terme de complications », explique le Pr Henri-Jean Aubin (président de la Société Française d'Alcoologie, CHU Paul-Brousse, Villejuif).
Il faut donc en informer les hommes de 50 ans, souvent buveurs à risque, et les encourager à modérer leur consommation. Bière, apéritif, repas arrosés... le Français de 50 ans a en effet tendance à boire. Et à « boire trop » en dose cumulée et/ou en nombre d'alcoolisations excessives, sans vraiment y prêter attention. La consommation moyenne masculine s'établit à 43 g/j (4,3 verres) d’alcool/jour contre 13 g/jour pour les femmes. « Or toute consommation supérieure à 21 verres d'alcool par semaine (3 verres/j) influe sur la santé », rappelle le Pr Aubin. D'autant qu'à l'exposition alcoolique s'ajoutent d'autres facteurs de risque (surpoids, âge, HTA, vieillissement du cerveau, etc).
12 millions de buveurs à risque ponctuel
Cependant, la consommation moyenne d'alcool a régulièrement baissé depuis 50 ans. En France, on est ainsi passé de 26 à 12 litres/personne/an de 1961 à 2011. Mais les alcoolisations ponctuelles importantes (5-6 verres en une seule occasion) ont progressé, en particulier chez les ados et jeunes adultes, ainsi que le nombre de « gros » buveurs. Au total, parmi les 18-75 ans, on estime avoir aujourd'hui près de 12 millions (28%) de buveurs à risque ponctuel, 4 millions (9%) à risque chronique (gros buveurs) – un chiffre en hausse – et 0,5 million à risque de dépendance, selon un rapport remis à la Mildt en 2013 par le Pr Michel Reynaud (CHU Paul-Brousse, Villejuif).
Or chaque verre d'alcool influe sur le risque hépatique et sur celui de cancer. Et au delà de 21 verres par semaine, la santé trinque. Le risque de complication suit, en effet, une courbe exponentielle. Quelques verres de plus augmentent bien plus ce risque - déjà élevé - d'un gros buveur que celui d'un petit buveur. « Toute réduction de consommation, même limitée, est donc intéressante », souligne le Pr Aubin. Le risque cardiovasculaire (AVC ischémique, infarctus) lié à la consommation d’alcool suit quant à lui une courbe en J quel que soit l'alcool – exit la spécificité du vin rouge –, avec une réduction du risque pour une faible consommation (1-2 verres/j), puis une augmentation au-delà.
La mortalité augmente dès le premier verre
En revanche, « la mortalité, toutes causes confondues, augmente dès le premier verre (dès 10 g/j) ainsi que le risque d'hépatopathie, de cirrhose, et de cancers en particulier hépatique, ORL et digestifs », résume le Pr Aubin. Et si passer de 0 à 3 verres/j augmente peu le risque, « l'impact de l’augmentation de 15 à 18 verres par jour est colossal », précise-t-il.
Un article récent (« Reduction of Drinking in Problem Drinkers and All-Cause Mortality », Alcohol, 2013) s’est d'ailleurs attaché à vérifier l'impact individuel de la consommation énolique sur la mortalité. Et cette méta-analyse de données individuelles issues des registres et d'études randomisées a confirmé que la consommation d'alcool pèse effectivement individuellement sur le risque de décès, conclut le Pr Aubin.
Mais les risques liés à l'alcool – autres que le retrait de permis – sont très sous- estimés. L’alcool est en effet la « drogue » la plus dangereuse en terme de complications à la fois sanitaires et sociétales, devançant héroïne et cocaïne, suivis du tabac sur le plan sanitaire et du cannabis du point de vue sociétal. « Toutefois, selon Michel Raynaud, les Français surévaluent les méfaits des drogues illégales. Et sous- évaluent ceux liés à l'alcool ».
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