Les femmes et la ménopause

Plus d’un tiers de vie sans hormones

Publié le 05/05/2014
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Crédit photo : PHANIE

Les plaintes dues à l’arrêt de sécrétions hormonales ovariennes se rajoutent aux pathologies liées à l’âge pour altérer la qualité de vie des patientes 12 millions de femmes ménopausées en France dont plus de la moitié a plus de 65 ans. Quelle prise en charge proposer pour leur assurer un « vieillissement réussi » (1) le « successfull aging » des anglo-saxons ?

Selon P. Le Deun, le vieillissement réussi concerne 12 à 58 % de la population âgée et est obtenu grâce au maintien des capacités fonctionnelles en absence de pathologie. C’est dire qu’il faut tout mettre en œuvre pour lutter contre le vieillissement « pathologique » dû aux maladies liées à l’âge.

Dans le cas de la ménopause, il faudra prendre, aussi, en charge les troubles climatériques : bouffées de chaleur, douleurs musculaires et articulaires, troubles du sommeil, baisse de la libido, dystrophie urogénitale.

Certains effets à long terme d’une hypooestrogénie vont aggraver certaines pathologies liées au vieillissement comme les maladies cardio-vasculaires, l’ostéoporose ou la démence.

Le THM en voie de réhabilitation

Plus de 10 après la publication de l’étude nord-américaine Women Health Initiative (2002) et de la Million Women Study (2003) qui avait contesté le rôle préventif des estrogènes sur le système cardio vasculaire pourtant attesté par des études précédentes, le traitement hormonal de la ménopause est en voie réhabilitation.

En 2007, les investigateurs de la WHI sont revenus sur les résultats de cette étude. Les femmes ont été séparées en 2 groupes : avant et après 60 ans. C’est alors qu’est apparu le concept « fenêtre d’intervention ». Le THM a une action différente sur les vaisseaux selon le moment de son initiation. Plusieurs études depuis sont parues confortant ces résultats. Les œstrogènes agissent différemment : sur un organe sain, ils ont un effet trophique et anti inflammatoire, avec un effet endothélial prédominant ; sur un organe malade, ils ont à l’inverse, un effet pro inflammatoire aggravant les plaques d’athérome instables.

La parution de la KEEPS en 2012 (Kronos Early Estrogen Prevention Study) va encore prouver l’intérêt d’un THM en prévention des maladies cardiovasculaires. L’étude randomisée en double aveugle versus placebo, a duré 4 ans et inclus 727 femmes âgées de 42-58 ans. Deux associations ont été testées : ECE+ progestérone micronisée et 17 ß-estradiol + progestérone micronisée. Quel que soit le groupe, il n’est apparu aucun effet négatif ni sur le plan cardiovasculaire que dans celui du cancer du sein ou de l’endomètre. Ces femmes « jeunes ménopausées » ont vu diminuer leurs bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, et ont retrouvé une qualité de vie meilleure. Leur densité osseuse s’est aussi améliorée.

Les dernières recommandations de l’International Menopausal Society (IMS) en 2013 confirment ce rôle de prévention, tant sur le plan cardiovasculaire que sur le plan osseux. L’utilisation du 17 ß-estradiol par voie transdermique et de progestatifs comme la progestérone naturelle micronisée ou la dydrogestérone est recommandée dans la majorité des publications internationales.

Au-delà du traitement

Peut-être que, comme l’a dit le Dr Christian Jamin, la WHI a-t-elle été un « désastre bénéfique ». Les femmes et leurs médecins peuvent à nouveau prendre et prescrire un THM associant le 17 ß-estradiol, de préférence par voie transdermique à la progestérone naturelle micronisée ou à son isomère la dydrogestérone, lorsque les symptômes climatériques le requièrent.

L’HAS n’a pas encore, malgré toutes les preuves publiées, reconnu ce rôle préventif pour les maladies coronariennes mais une révision des recommandations devrait être publiée.

Toutefois la prise en charge des femmes à la ménopause ne se résume pas au fait de prescrire ou non un THM. Ce dernier viendra seulement aider à améliorer leur qualité de vie en agissant sur les bouffées de chaleur, les sueurs nocturnes et les troubles du sommeil. Il pourra agir en prévenant la survenue d’une ostéoporose.

Avec ou sans traitement, il faudra expliquer aux patientes la nécessité de se faire suivre régulièrement pour pouvoir prévenir les pathologies susceptibles de se déclarer à partir de 50 ans, la nécessité d’une prise en charge nutritionnelle, du maintien d’une activité physique dont le rôle est reconnu dans la prévention du syndrome métabolique voire de certains cancers.

« Quels que soient les progrès accomplis dans la médecine de pointe, le message fondamental reste que toute réduction majeure de la morbidité et des incapacités… sera obtenue avant tout par la prévention et non simplement par le traitement », le Dr Judith Mackay de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Dr Lydia Marié-Semama

Source : Le Quotidien du Médecin: 9324