DANS SES RECOMMANDATIONS pour la pratique clinique en date de 2004, l'ANAES précisait que «le cancer de la prostate est en France le cancer le plus fréquent chez l'homme de plus de 50ans». En raison du vieillissement de la population, le cancer de la prostate occupe ainsi une place croissante dans la pratique médicale quotidienne. Les recommandations rappelaient que, d'après les différents registres français des cancers, on estimait «à environ 40000 les nouveaux cas de cancer de la prostate en 2000». On estime actuellement le nombre de nouveaux cas annuels à 62 000 en France, les trois quarts environ étant des formes localisées.
Par ailleurs, ce cancer est parfois grave. En effet, toujours pour l'année 2000, il a été responsable de 10 000 décès environ, représentant ainsi «la deuxième cause de mortalité par cancer chez l'homme, en France, après le cancer du poumon».
Enfin, le texte de l'ANAES soulignait à juste titre l'évolution souvent lente du cancer de la prostate. Lorsqu'il est « localisé », c'est-à-dire limité à l'intérieur de la prostate, il a la particularité d'être silencieux. Le patient ne peut pas le détecter ou le suspecter en raison de la présence de signes fonctionnels. Il est en effet totalement asymptomatique et n'est pas accessible à la palpation.
Néanmoins, l'opportunité d'un dépistage par un test de dosage de l'antigène spécifique de la prostate (PSA) sérique total n'est actuellement «pas recommandé dans le cadre d'un dépistage de masse», c'est-à-dire organisé ou de manière systématique.
Dans le cadre de la pratique quotidienne, le dépistage individuel par le test de dosage du PSA s'est développé en France.
L'AFU préconise un dépistage annuel chez les 50 à 75 ans.
Depuis 2002, l'Association française d'urologie, accompagnée dans cette démarche par l'Académie de médecine, préconise le dépistage individuel du cancer de la prostate par la réalisation annuelle d'un dosage de l'antigène spécifique de la prostate et d'un toucher rectal chez les hommes de 50 à 75 ans (1).
Les facteurs de risque du cancer de la prostate sont connus. Ainsi, entre 50 et 70 ans, sa prévalence est de 30 % sur les pièces de cystoprostatectomie. Il existe un facteur génétique, son risque étant multiplié par deux si deux parents du premier degré ont été atteints. Le fait d'appartenir à une ethnie africaine est associé à une multiplication du risque par 1,5. Le rôle de l'environnement a été souligné, en particulier celui des graisses animales.
Le premier outil de détection est le dosage de l'antigène prostatique spécifique (PSA), qui est un marqueur spécifique du tissu prostatique. Le diagnostic est exclusivement fondé sur le prélèvement prostatique sous échographie. Il faut souligner que 30 % des biopsies sont positives si le taux de PSA est compris entre 4 et 10 ng/ml, la sensibilité du marqueur étant alors le double de celle de l'examen clinique. Pour augmenter la sensibilité de cet examen, le seuil de positivité doit être abaissé à 3 ng/ml, surtout entre 50 et 60 ans.
Intervenir pendant la « fenêtre de curabilité ».
La conjonction du dosage de l'antigène prostatique spécifique et du prélèvement prostatique sous échographie s'est matérialisée par une augmentation du nombre de cancers prostatiques diagnostiqués à un stade précoce. À ce stade, ils sont accessibles à un traitement curatif. Cela permet de définir la « fenêtre de curabilité », qui commence lorsque le cancer de la prostate devient détectable, il est alors curable, et qui se termine par les symptômes tardifs, la tumeur étant alors non curable.
Toute la difficulté du dépistage consiste à faire la distinction entre le cancer de prostate à risque de progression et le cancer indolent. Cette distinction a pour finalité de ne pas traiter des patients qui ne le nécessitent pas.
C'est pourquoi les progrès attendus en matière de dépistage du cancer de la prostate sont doubles. Il est nécessaire de savoir s'il faut ou non remplacer le dépistage individuel par un dépistage systématique ou « de masse » dans une limite d'âge. La deuxième question est d'identifier les outils qui permettront de reconnaître les formes à haut risque de progression parmi les patients chez lesquels un cancer de la prostate a été dépisté, afin de les distinguer des formes non significatives, qui ne justifient pas un traitement précoce mais une simple surveillance. Enfin, les conséquences du dépistage sur la mortalité spécifique seront analysées. Trois idées clés doivent être associées au dépistage : sa précocité, la performance thérapeutique à laquelle il conduit et l'accessibilité des patients à l'information. Celle-ci s'impose pour informer des possibilités de dépistage, mais aussi après le diagnostic, pour expliquer les possibilités thérapeutiques.
D'après un entretien avec le Pr Pascal Rischmann (CHU, Toulouse).
Références:
(1) Coulange C. Intérêt du dépistage du cancer de la prostate. E-mémoires de l'Académie nationale de chirurgie 2002 ; 1 (3) : 4-5.
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