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Mise à jour de la littérature : bien distinguer l’intérêt du THM

Publié le 03/11/2014
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Crédit photo : DR

La publication des récentes études sur la prise en charge des femmes à la ménopause a permis de remettre en question les résultats publiés en 2002 dans la WHI (1). L’international menopausal society (IMS) a rappelé, lors de son congrès à Cancun en mai dernier, l’intérêt du traitement hormonal de ménopause (THM) dans la prévention des maladies cardiovasculaires, lorsqu’il est prescrit en début de ménopause ou dans les 10 ans qui suivent (c’est la fenêtre d’intervention).

Bien que la quasitotalité des sociétés savantes internationales soit unanimes pour aller dans ce sens, il existe toujours une frilosité des prescripteurs et des patientes. La littérature de ces dernières années gagnerait à être mieux connue, afin de pouvoir faire bénéficier à ces patientes souffrant de signes climatériques importants (bouffées de chaleur, sueurs nocturnes…) d’un traitement efficace.

Crainte du risque mammaire

La cause principale est la crainte du risque mammaire. Pourtant, de nombreuses études viennent contredire les données de 2002, et notamment la différence entre les molécules de progestatifs utilisés. Rapellons l’étude WHI (1) avait montré que les femmes sous THM avaient un surrisque variable de cancer du sein, entre 1,24 et 1,28, souvent peu significative en termes de statistique. Or Anderson a mis en évidence que cette élévation, lorsqu’elle est ajustée à d’autres facteurs de risque, n’est plus statistiquement significative (2).

Globalement, il faut retenir qu’il n’y a pas d’augmentation de risque en l’absence de traitement antérieur, ni jusqu’à 7 ans de prise du THM. Il s’agit en fait, pour la plupart des auteurs, de la promotion d’un cancer sous-jacent.

Tant aux États-Unis qu’en Europe, de nombreuses études publiées depuis confirment le résultat de la WHI mais en distinguant les traitements dans la majorité des cas et notamment, pour les études européennes, les progestatifs utilisés. En 2008, Fournier et son équipe montrent la différence existant entre la progestérone naturelle et son isomère, la dydrogestérone. Le surrisque de développer un cancer du sein est de 1,08 (0,89-1,31) pour la progestérone micronisée naturelle et de 0,77 (0,36-1,62) pour la dydrogestérone. Quant aux progestatifs de synthèse, le surrisque est équivalent à celui retrouvé dans les autres études. Les mêmes conclusions sont retrouvées par H. Lyytine en Finlande (3).

Plus récemment, une étude française cas-témoin en Côte-d’Or et Ille-et-Vilaine est arrivée aux mêmes conclusions (4). Estradiol (E2) associé à progestérone naturelle ont un OR = 0,80 (0,44-1,43) ; E2 associé à un progestatif de synthèse : OR =1,72 (1,11-2,65) ; E2 et dérivés de la testostérone : OR = 3,35 (1,05-10,4). Ce risque n’augmente pas avec la progestérone naturelle après 4 ans de traitement.

La WHI avait également montré qu’il n’y avait pas d’augmentation de risque chez les femmes hystérostomisées prenant un estrogène conjugué équin seul (Premarin = 0,625 mg/jour) ; il y a même une diminution de l’incidence de survenue de ces cancers (5).

Toutes ces publications montrent donc un effet promoteur de certains THM sur certains cancers du sein infracliniques préexistants. Le risque relatif est faible, le THM efface l’effet protecteur de la ménopause. De plus, ce traitement diminue la sensibilité du dépistage organisé.

D’après les communications des Drs Marc Espié et Lydia Marié-Scemama lors de la session de l’Association Française d’Études sur la Ménopause (AFEM)

(1) Writing Group for the Women’s Health Initiative Investigators. Risks and Benefits of Estrogen Plus Progestin in Healthy Postmenopausal Women. JAMA 2002;288:321-333

(2) Anderson GL, Chlebowski RT, Rossouw JE et al. Prior hormone therapy and breast cancer risk in the Women’s Health Initiative randomized trial of estrogen plus progestin. Maturitas. 2006 Sep 20;55(2):103-15

(3) Lyytinen H et al. 2009 Obstet Gynecol;113:65-73

(4) Cordina-Duverger E, Truong T, Anger A et al. Risk of breast cancer by type of menopausal hormone therapy: a case-control study among post-menopausal women in France. PLoS One. 2013 Nov 1;8(11):e78016

(5) Anderson GL, Chlebowski RT, Aragaki AK et al. Conjugated equine oestrogen and breast cancer incidence and mortality in postmenopausal women with hysterectomy: extended follow-up of the Women’s Health Initiative randomised placebo-controlled trial. Lancet Oncol. 2012 May;13(5):476-86

Dr Lydia Marié-Scemama
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Source : Le Quotidien du Médecin: 9362