Le bénéfice de la kinésithérapie respiratoire dans la bronchiolite du nourrisson fait débat depuis de nombreuses années. En 2000, la conférence de consensus proposait une prescription, non pas systématique mais guidée par le degré de l’encombrement de l’enfant. Depuis, les données scientifiques se sont accumulées, témoignant que la kinésithérapie respiratoire ne réduit pas le délai de guérison et ne participe pas à une prévention des hospitalisations.
La kinésithérapie respiratoire pour les bronchiolites du nourrisson n’est prescrite largement que dans quelques pays, principalement la France et la Belgique. La comparaison des données épidémiologiques françaises (1), à celles de pays ne proposant pas cette kinésithérapie, comme l’Angleterre (2,3) montre que malgré des pratiques très différentes, les taux d’hospitalisation pour bronchiolite avant l’âge d’un an sont très proches (2,4 % en Angleterre, 3,6 % en France), ainsi que la durée médiane de séjour hospitalier (1 jour en Angleterre, 2 jours en France) et les taux de décès pour cause respiratoire avant 1 an (2,9/100 000 en Angleterre, 2,6/100 000 en France). Ainsi, même si les systèmes de soins ne sont pas totalement superposables, chaque pays fait face chaque année aux mêmes formes compliquées, indépendamment de la prise en charge pré-hospitalière.
À ces données, s’ajoutent celles d’études randomisées robustes montrant que la kinésithérapie respiratoire n’accélère pas la guérison. Dans l’essai randomisé français BRONKINOU, incluant 496 nourrissons hospitalisés, la pratique de 3 séances quotidiennes de kinésithérapie respiratoire n’a pas modifié la durée d’hospitalisation, comparativement au groupe ne bénéficiant que d’aspirations nasales (4). La kinésithérapie n’a pas prévenu la survenue de complications sévères (passage en soins intensifs ou recours à une ventilation). L’étude suisse randomisée, sur 99 nourrissons de moins d’un an, a confirmé l’absence d’impact significatif de la kinésithérapie respiratoire sur la durée d’hospitalisation (5). La récente méta-analyse Cochrane, (9 essais, 891 nourrissons) conclut à l’absence d’effet significatif de la kinésithérapie sur les complications de la maladie, le recours à une oxygénothérapie, ou la durée d’hospitalisation (6).
Recentrer la prise en charge sur les points essentiels
Il est donc temps de changer nos pratiques. La bronchiolite nécessite uniquement des mesures symptomatiques et une surveillance médicale. La kinésithérapie respiratoire n’a pas sa place à titre systématique. Certains enfants, très encombrés, apparaissent améliorés après une séance de kinésithérapie, mais toutes les données montrent que cet effet n’est que très transitoire, et donc sans bénéfice durable. Il est temps de recentrer la prise en charge des nourrissons avec bronchiolite sur les points essentiels à transmettre à la famille : apprentissage de la désobstruction rhino-pharyngée, fractionnement des repas, information sur les signes nécessitant une nouvelle consultation chez le médecin traitant ou les urgences hospitalières. Dans un pays comme la France, marquée par une longue tradition de kinésithérapie respiratoire dans la bronchiolite, l’évolution ne pourra être que progressive, mais elle est inéluctable !
Hôpital Necker-Enfants Malades, Paris
Références
1. Che et al. Arch Ped 2 012 ; 19 : 700-706
2. Murray et al. PLoS One 2 014 ; 9 (2) : e89186
3. Fleming et al. J Epidemiol Community Health 2 005;59:586–590.
4. Gajdos et al. PLoS Med 2 010 ; 7 (9) : e1000345
5. Rochat et al. Eur J Pediatr 2 012;171:457-62
6. Roqué i Figuls et al. Cochrane Database Syst Rev. 2 012 ; 2 : CD004873
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