La neuropédiatrie est la seconde discipline en pédiatrie après l’oncologie à être confrontée à des décès au décours de maladies progressivement invalidantes. Le rapport à la technique médicale, avec une augmentation du nombre des demandes pour prolonger la vie à tout prix, et les progrès de la médecine entrent en ligne de compte ainsi que les questions liées aux croyances des familles, leur spiritualité, voire leur religion. Il est essentiel que chaque élément de la prise en charge ait du sens pour tous, pour l’enfant, pour les parents comme pour l‘ensemble des professionnels ou accompagnants naturels.
L’évolution des différentes pathologies neurodégénératives chez l’enfant est connue mais reste aussi individuelle à chacun. Il est donc nécessaire dans l’information aux parents comme dans les choix thérapeutiques de ne pas méconnaître cette individualité même si certaines échéances paraissent inexorables.
La perte des acquis moteurs sera cruellement appréhendée par les parents et conduira à une perte d’autonomie dans la vie courante. La diminution de la qualité de communication avec la perte ou la non-acquisition du langage nécessite de développer des alternatives pour garder le lien. L’apparition d’une atteinte neurosensorielle qui compromet aussi la qualité de la communication, doit être dépistée et compensée.
Les comorbidités posent chacune le choix des alternatives thérapeutiques qu’il faut rediscuter avec les parents et les soignants. Les déformations articulaires, la survenue d’une scoliose source d’inconfort respiratoire, d’une luxation de hanche à l’origine de douleurs, doivent faire l’objet d’une discussion multidisciplinaire. Les problèmes nutritionnels et de déglutition aggravent la fragilité de ces enfants (dénutrition, pneumopathie de déglutition) et conduisent à proposer une nutrition entérale sur sonde nasogastrique ou gastrostomie. Ces gestes techniques modifient le relationnel familial et transforment souvent les parents en soignants avec un épuisement qu’il convient d’anticiper. Les manifestations épileptiques peuvent être améliorées par un traitement médicamenteux, au prix parfois, là aussi, d’une diminution de la vigilance et de la qualité de l’interaction sociale. Sur le plan respiratoire, l’atteinte paralytique des muscles respiratoires, les pneumopathies dues à des fausses routes, les apnées d’origine centrales, sont souvent responsables d’hospitalisations répétées et au cœur de la discussion de limitation de soins qui va conduire au décès. Le cercle vicieux s’installe entre les différentes complications neurologiques, orthopédiques, respiratoires et digestives, sources d’inconfort, de douleurs et d’hospitalisations répétées. Les aggravations aiguës signent souvent le franchissement d’un palier dans la gravité de la maladie. Elles sont l’occasion de rediscuter le projet de vie de l’enfant, de poser l’indication d’un nouveau traitement mais aussi de définir avec les parents la légitimité d’une limitation des soins.
La prise en charge doit être multidisciplinaire et faire l’objet d’un échange entre les différents intervenants. Les choix thérapeutiques comme la réflexion de limitation de soins doivent être collégiaux et prendre en compte l’expertise neuropédiatrique mais aussi la connaissance de la qualité de vie au quotidien de ces enfants par d’autres « experts » (parents, éducateurs, infirmiers, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, kinésithérapeutes). L’apport des unités de soins palliatifs et d’une réflexion collective est indiscutable et doit se poursuivre en mixant deux cultures qui se rejoignent sur un objectif, le bien-être de l’enfant et une prise de décision partagée.
Hôpital Necker-Enfants Malades (Paris). Présidente de la Société française de neuropédiatrie
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